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Fongicides SDHI Controverse sur leur dangerosité

Les fongicides SDHI sont utilisés, entre autres, sur de nombreuses cultures ornementales et les terrains de sports. © Pascal Fayolle

Une étude affirmant que les SDHI (fongicides inhibiteurs de la succinate déshydrogénase) sont toxiques pour la santé humaine, parue en novembre 2019 dans la revue scientifique PLOS One, a relancé le débat sur la dangerosité de ces produits. Des associations réclamaient déjà en avril 2018 l’arrêt de leur commercialisation.

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Ces produits sont utilisés, essentiellement en préventif, depuis plus de 40 ans pour le traitement fongique des céréales, de la vigne, des vergers, des légumes, des plantes ornementales, et sur les pelouses. Ils sont utilisés à grande échelle depuis 2009 en France. Certains sont aussi vendus comme nématicides, pour éliminer les nématodes qui jaunissent les terrains de golf, sport et de pelouses. Les agriculteurs français en utiliseraient entre 500 et 700 tonnes par an (sur un total d’environ 70 000 tonnes de pesticides)*.

Dans une étude publiée dans la revue scientifique PLOS One, des chercheurs français auraient mis en évidence que ces fongicides sont toxiques pour les cellules humaines. Cette étude a été très reprise dans les médias.

Des fongicides qui ne touchent pas que les champignons

« Des scientifiques français viennent de mettre en évidence que huit molécules fongicides SDHI […] sont aussi capables de bloquer l’activité de la succinate déshydrogénase (SDH) du ver de terre, de l’abeille et des cellules humaines, dans des proportions variables » indique dans un communiqué de presse le CNRS, qui rappelle que « chez l’humain, un dysfonctionnement de la SDH est associé à de graves pathologies ».

Ils montrent notamment dans cette étude que l’action des SDHI n’est pas spécifique. Or l’enzyme SDH, universelle, assure la respiration des cellules de quasiment toutes les espèces vivantes. Ces fongicides peuvent donc être délétères pour des organismes non ciblés.

Pierre Rustin, directeur de recherche au CNRS et qui a dirigé ladite étude, est très virulent contre l’Anses (Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail) dans ses interview et interventions : « Affirmer qu’il n’y a pas de danger est insupportable. On prend un risque monstrueux, le principe de précaution doit s’appliquer. On ne peut se permettre d’attendre la catastrophe comme l’Anses semble le faire ! » condamnait-t-il dans le quotidien Libération. Il avait par ailleurs déjà cosigné une tribune sur le site internet de Libération en avril 2018 sur les risques potentiels des SDHI.

Si l’Anses reconnait que l’étude apporte de nouvelles données, elle commente « en tout état de cause, il est hasardeux de comparer les valeurs […] obtenues in vitro dans des conditions de laboratoire avec les concentrations de SDHI qui pourraient résulter des applications des pesticides sur les cultures, comme le soulignent les auteurs dans leur article » dans un rapport du 8 novembre 2019.

En janvier 2019, l’Anses avait conclu que le niveau de risque par voie alimentaire est faible et que les substances sont rapidement éliminées par l’organisme. Mais l’Anses poursuit ses recherches sur le sujet et devrait publier début 2020 ses résultats sur les expositions cumulées aux différents fongicides SDHI via l’alimentation.

La modification ou le retrait des autorisations de mise sur le marché n’est, pour l’instant, pas à l’ordre du jour.

Léna Hespel

*Selon la base nationale des ventes des produits phytosanitaires, consultable sur data.gouv.fr

Les effets de huit SDHI différents ont été étudiés, à savoir le flutolanil, le fluopyram, le boscalid, le fluxapyroxad, le penflufen

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