Se retrouver, même en virtuel !
Le Salon du végétal, organisé en ligne à la mi-septembre, a permis d’échanger sur les conséquences de la crise et d’imaginer l’après, ensemble.
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Premier rendez-vous français post-confinement, l’édition virtuelle du Salon du végétal, les 14 et 15 septembre, a rassemblé tous les acteurs de la filière, avec, en ligne de mire, une sortie de crise. « L’objectif, c’est de se retrouver, de se rassembler et, ne l’oublions pas, de faire du business », souligne Thierry Browaeys, président du BHR (bureau horticole régional) en introduction de la journée de tables rondes lundi 14 septembre. Les participants pouvaient en effet consulter la liste des producteurs français référencés et programmer des rendez-vous. « Personne n’était préparé à cette crise, observe Mikaël Mercier, président de l’interprofession Val’hor. Il y a eu des choix compliqués à faire. » Mais l’atterrissage semble moins violent que prévu au début de la crise, malgré de grandes disparités selon les métiers et la taille des entreprises. La réouverture des points de vente en avril et la volonté de nombreux Français de jardiner ont en partie sauvé la mise.
État des lieux
Alors que la saison s’arrête généralement à la fête des Mères, cette année, elle s’est prolongée. « On a fait de très belles ventes jusque fin août, confirme Pascal Renaud, des pépinières Gicquiaud, à Saint-Lyphard (44). On est désormais à 5 % de perte de chiffre d’affaires. En octobre, on aura peut-être rattrapé le retard. » Mais tous les producteurs n’ont pas réussi à reprendre rapidement. Notamment, les pépiniéristes qui fournissent les collectivités et les entreprises (voir aussi en page 42).
Un point sur lequel les producteurs invités aux tables rondes ont mis l’accent est la mise en commun et le partage. « Il faut qu’on se retrouve entre producteurs. On n’a pas assez de réseau », estime Pascal Renaud. « Pendant le confinement, on a beaucoup échangé, mis en commun nos disponibles. On s’est rendu compte qu’on produisait beaucoup de choses en France », abonde Jean-Marc Auray, des pépinières du Val d’Erdre, à Saint-Mars-du-Désert (44).
Côté consommation, lorsque les jardineries ont rouvert, « on a battu record après record dans certaines familles de produits, rapporte Patrick Abadie, de Truffaut. Mais, à la mi-septembre, on n’a pas rattrapé le retard sur le végétal ». Au départ, ce qui a été le plus vendu, c’était les plantes à finalité vivrière : plants potagers, petits fruits, arbres fruitiers, aromatiques. Ensuite est venu le tour des plantes pour les balcons, terrasses ou d’intérieur. Les fleurs coupées et les plantes d’intérieur fleuries sont les catégories qui ont eu le plus de mal à se vendre.
À la fin de la première table ronde consacrée à l’état des lieux de la filière, Brand Wagenaar, analyste des filières horticoles, a fait un point sur la situation à l’international. Partout, les consommateurs ont plébiscité le végétal. « On a attiré beaucoup de gens, il faut maintenant les retenir. Il faut éviter les espoirs déçus pour ne pas perdre ces nouveaux consommateurs acquis pendant la crise. Les informations sur le produit doivent être claires, très simples à comprendre », assure-t-il. Autre sujet d’importance, selon lui, « l’empreinte carbone de notre production. Il faut s’y intéresser maintenant. On devra bientôt la renseigner partout ».
Des tendances confirmées par la crise
Avant la crise, « la vente en ligne représentait à peine 1 à 2 % des achats de plantes, rappelait Mikaël Mercier en introduction de la journée. Pendant le confinement, la grande distribution et Internet étaient les deux seuls canaux qui restaient ouverts ». Le e-commerce a donc beaucoup bénéficié du confinement. Chez Promesse de fleurs (voir page 15), spécialiste de la vente de plantes en ligne, Adrien Moreau, responsable des achats, confirme cet engouement : il y a eu une multiplication des ventes par trois au début de la crise.
Certains producteurs ont tenté de passer à la vente en ligne, pas toujours sans mal. « Notre métier, c’est la production et la vente en distribution spécialisée, indique Marie Levaux, productrice aux Établissements horticoles du Cannebeth, à Mauguio (34), et présidente de la FNPHP (Fédération nationale des producteurs horticulteurs pépiniéristes). On a changé de métier pendant quelques semaines. On avait un outil de vente par correspondance depuis une dizaine d’années, pour les collections botaniques, mais il était très discret ! »
Aux pépinières Gicquiaud, « on est passé de trente à 400 commandes par jour, relate Pascal Renaud. On en avait trop, on n’était pas armés pour les honorer. On aurait dû en refuser ». Les transporteurs habituels, La Poste et Geodis, ne livrant plus, il a fallu en trouver d’autres, mais les retards se sont accumulés, comme les commentaires négatifs, difficiles à vivre durant cette période.
Si la crise a pris de court certains acteurs de la filière dans le numérique, elle a permis de grandes avancées. Beaucoup en ont profité pour développer des outils. « Aujourd’hui, on ne peut pas être dans le déni pour le digital », reconnaît Marie Levaux.
Autre grande tendance du confinement : l’achat de proximité. Livraison locale, drive, produits français… les consommateurs se sont montrés plus attentifs à la provenance des produits. « La mise en place du drive a amené de nouveaux clients, qui sont revenus après le confinement. Le point de vente de détail a progressé en mai-juin », constate Jean-Marc Auray.
Du côté des professionnels aussi. Avec les frontières fermées (lire pages 44-45) et les difficultés d’approvisionnement, « il y a eu beaucoup de demandes de fleuristes pour connaître les producteurs locaux », révèle par exemple Mikaël Mercier.
Une série de webinaires
La journée du mardi était consacrée à des webinaires. En comptant celui sur le recrutement organisé par Apecita lundi après-midi, les participants au Salon ont pu en suivre sept, aux sujets variés. En écho à la tendance de produits de proximité et français confirmée pendant la crise, un webinaire a fait le point sur les labels, notamment Plante Bleue et Fleur de France.
Deux autres étaient proposés par Végépolys Valley. Un premier sur le marché russe. « Les consommateurs y sont très amateurs de qualité française et sont à la recherche de produits innovants », note Amaury Vildrac, directeur associé du groupe Dualest. Un focus a été fait sur les fleurs coupées, qu’ils affectionnent particulièrement. Le deuxième rendez-vous de Végépolys s’est intéressé aux applications des marqueurs moléculaires dans l’ornemental : identifier et authentifier le genre, l’espèce ou la variété, rechercher la parenté, évaluer et exploiter la diversité génétique, accélérer la création variétale en sélectionnant un caractère grâce à un marqueur… « Ces technologies deviennent plus rapides et moins chères », estime Anne Rodier, du centre R&D (recherche et développement) de l’organisme.
Deux autres webinaires étaient animés par Laurent Péron, d’Evoxya : « Quels changements dans les business models du secteur végétal à la suite de la crise de Covid-19 ? » et « L’importance de l’expérience utilisateur et de la communication multicanal dans l’achat de végétaux ». Il est notamment revenu sur les tendances accélérées : le DIY (do it yourself, faire soi-même), la proximité, la simplicité et la sécurité.
Le dernier webinaire était consacré à Floriscope et Végéstock (lire Le Lien horticole n° 1098, pages 46-47).
À la fin de ces deux journées d’échanges virtuels, le mot d’ordre était : rendez-vous en février... en présentiel ! « C’est hyper important de rompre nos solitudes », a conclu Christophe Béchu, maire d’Angers.
Léna Hespel
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