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SNHF Fleurs coupées : structurer et rendre attractive la filière

La production de fleurs locales et de saison en ferme florale se développe depuis quelques années, comme ici sur les toits de l’hôpital Robert-Debré à Paris.

La Société nationale d’horticulture de France (SNHF) a consacré, fin novembre 2022, sa journée annuelle d’information à cette production. La filière cherche à profiter de l’essor de la consommation locale.

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La production française de fleurscoupées a fortement diminué ces dernières années. Le développement du local peut-il inverser la tendance ? C’est la question à laquelle se consacrait la journée d’information « Fleurs d’ici, fleurs d’ailleurs : quelle place pour la production française » mercredi 23 novembre dans les locaux de la Société nationale d’horticulture de France (SNHF), à Paris.

« Le goût du local qui se développe ces dernières années touche la fleur coupée. Pouvons-nous en profiter ? Pour quels créneaux et quelle qualité ? » se demandait Yvette Dattée, présidente du conseil scientifique de la SNHF, en introduction de la journée. Une interrogation partagée par de nombreux acteurs de la filière, à en croire le panel de participants : chercheurs, grossistes, obtenteurs, gros producteurs de fleurs, exploitants de fermes florales, associations, mais aussi représentants des instances professionnelles étaient présents.

Les raisons du déclin

Le nombre d’exploitations et de producteurs de fleurs en France diminue depuis les années 70. À cette période, alors que l’on passe d’une dépense occasionnelle à une consommation de masse pour les fleurs coupées, le choc pétrolier augmente le coût de l’énergie, l’étalement urbain fait pression sur le foncier – en particulier dans la région Paca – et la concurrence étrangère, notamment hollandaise, se fait sentir. Toutes ces raisons affectent la compétitivité des producteurs français.

Puis, à la fin du XXe siècle, la production se développe dans des pays plus favorables à la culture de fleurs, comme le Kenya. Il est possible d’y faire six à sept récoltes par an (contre deux maximum dans le Var) et la main-d’œuvre est beaucoup moins chère.

La France est désormais le sixième importateur mondial de fleurs coupées fraîches. Environ87 % des fleurs achetées (en valeur) sont importées. Et cette tendance ne semble pas s’inverser pour l’instant. « Les importations françaises en roses sont reparties à la hausse depuis douze ans, témoigne Caroline Widehem, professeur à Agrocampus Ouest. Et même s’il y a eu une baisse en 2020 avec la crise du Covid, elles sont à nouveau plus fortes qu’en 2018-2019. »

En 2019, il y avait moins de 350 entreprises spécialisées dans les fleurs coupées, contre environ 8 000 en 1985. Des chiffres qui interrogent la filière : elle se demande si la production française est en train de disparaître. « Il y a pourtant un potentiel énorme pour la production de fleurs coupées en France, en termes de climats, de terres... » poursuit la chercheuse.

Un secteur qui redevient attractif

Depuis quelques années, de nouveaux projets voient le jour. Des jeunes, souvent en reconversion professionnelle, se lancent dans la production, suivant un modèle proche des micro-fermes en maraîchage. La plupart de ces fermes florales sont en ville, ou en périurbain, et vendent en direct leur production, ou livrent très localement, le plus souvent à vélo (Lire ici « L’agriculture urbaine désormais en fleurs ! » et « Cultiver des fleurs en pleine ville » LH n° 1087, p46-47).

« La plupart de ces fermes florales se sont développées ces dix dernières années, voire même ces trois dernières années », indique Léa Benoit, doctorante qui consacre sa thèse aux fleurs coupées en France. Si le mouvement est récent, une tendance se dessine : elles sont concentrées sur de petites surfaces, en plein air ou en serres froides, avec des espèces et variétés adaptées, et la commercialisation en circuit court et vente directe est complétée par de l’événementiel. Elles semblent être présentes dans toute la France, à l’exception du Sud-Est.  « Si on manque encore de recul concernant la viabilité de ces projets, on peut imaginer qu’ils le sont puisque les fermes créées il y a quelques années sont toujours là », estime-t-elle. Cette production de proximité est encouragée par la volonté d’une partie de la population à consommer plus localement.

Outre le développement de nouveaux types d'exploitations, l’attrait pour la production française se ressent également dans le succès que rencontre le Collectif de la fleur française. Créée en 2017 sur le modèle du slow flower venu des États-Unis, l’association reçoit de plus en plus de demandes d’adhésion (producteurs et fleuristes). Preuve également de l’engouement pour la production locale et de saison, les créateurs, et surtout créatrices, des fermes florales reçoivent de nombreuses sollicitations de jeunes en reconversion et d’étudiants qui souhaitent se lancer dans ce type d’entreprise. Un engouement qui ne se fait toutefois pas ressentir chez les producteurs plus traditionnels de fleurs, comme Bigot France. « On reçoit très peu de CV d’étudiants qui souhaitent travailler chez nous », regrette ainsi Nicolas Bigot.

Miser sur les labels et structurer la filière

En parallèle du collectif, qui sert surtout d’annuaire, d’autres méthodes permettent de soutenir les exploitations françaises. En particulier les labels. Certains sont plutôt à destination des grossistes, comme HortiSud, et d’autres pour les consommateurs. Ils valorisent la qualité – la charte qualité fleurs et le label rouge –, l’écoresponsabilité (Plante bleue, HVE) ou l’origine (indication géographique protégée et Fleurs de France).

Ces différents labels sont sous la responsabilité d’Excellence végétale, qui travaille à structurer le secteur de la fleur coupée. L’association est d’ailleurs lauréate d’un appel à projets. Appelé Bleu Blanc Fleur, ce projet d’étude de deux ans (2022-2023) vise à encourager l’installation de producteurs en fleurs coupées, de préférence engagés dans la démarche Fleurs de France.

L’innovation dans la production de fleurs coupées (comme l’aéroponie pour le Lisianthus : « L’aéroponie relance la production du lisianthus »), mais aussi la diversification des usages (fleurs comestibles...) ont également été évoquées lors de conférences durant cette journée. Les thèmes abordés et les échanges montrent un engouement pour cette production, en proie à de profonds changements. La mode du local est une opportunité pour relancer la filière, à condition d’être accompagnée et soutenue par la profession.

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