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Conférence sur l’évolution du climat à Paris « En ville, le contrôle de la température dépendra des végétaux qui seront plantés ! »

Quel paysage à Paris, demain, grâce à un nouveau PLU bioclimatique ? Telle est la question sensible et éminemment politique à laquelle la direction de l’urbanisme de la Ville de Paris a tenté d’apporter des éclairages via une conférence en ligne le 19 janvier 2022. ©P.Fayolle

Le 19 janvier dernier, une conférence en ligne a été proposée pour tenter de dresser le paysage futur de la capitale, qui est en train de travailler sur son PLU bioclimatique…

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Les orientations de certaines grandes villes qui ont vu arriver, à la faveur des dernières élections municipales, de nouveaux élus se posant clairement la question de la soutenabilité du futur climat dans leurs enceintes font réagir les citoyens.
Qu’il soit question de la place de la voiture et des transports doux ou du végétal, les changements ne se passent pas dans l’indifférence. Dans ce contexte, organiser une conférence pour sensibiliser tout un chacun aux conséquences des choix qui sont – ou seront – faits relève un peu de l’autoflagellation : les oppositions de tous bords sont largement représentées parmi les participants et les questions posées tournent vite autour de cas particuliers. Les arbres coupés à tel endroit ou la circulation infernale de tel quartier l’emportent vite sur la thématique générale : comment peut-on aménager la ville pour nous préparer à ce qui nous attend dans cinquante ans, voire moins.

En faisant abstraction de ce contexte, des conférences comme celles proposées le 19 janvier par la Ville de Paris, sur le thème « quel Paris en 2030 avec le futur PLU bioclimatique ? », portent leur lot de témoignages intéressants sur les réflexions en cours.

Faire face à de nouveaux enjeux

C’est à la direction de l’urbanisme de la Ville de Paris que l’on devait l’initiative. Son PLU bioclimatique est en cours d’écriture, avec la volonté affichée de rafraîchir et de désimperméabiliser. Chiara Santini, professeure d’histoire des jardins et du paysagisme à l’ENSP Versailles, Luc Abbadie, professeur d’écologie à la Sorbonne, et Thierry Laverne, paysagiste-urbaniste, en étaient les invités (l’intégralité des débats reste visible sur le Web, en particulier ici : 2nd Volet - Quel Paris en 2030 avec le futur PLU bioclimatique ? - Vers un nouveau paysage urbain? - YouTube).

Mais c’est Emmanuel Grégoire, premier adjoint à la maire de Paris, en charge, entre autres, de l’Urbanisme, qui a ouvert les débats. Pour lui, le PLU est aujourd’hui centré sur la production et le développement, ce dont Paris avait besoin auparavant. Mais cette vision est obsolète, il faut désormais faire face à de nouveaux enjeux, le dérèglement climatique, par exemple, et associer les Parisiens à la réflexion. Il faudra faire mieux avec moins, favoriser la biodiversité, reconstruire la ville sur elle-même pour moins s’étaler… Le tout avec un existant, à l’image d’un bâti qui n’a pas été pensé pour la réversibilité.

Trouver des solutions basées sur la nature

Chiara Santini a rappelé qu’Adolphe Alphand (1817-1891), jardinier de Paris, avait déjà pour objectif que tout Parisien puisse disposer d’un espace vert à moins de 300 mètres de chez lui. Et, déjà, ses projets avaient été beaucoup critiqués. Son aménagement des Champs-Élysées ne plaisait pas à tout le monde ! Et comme l’a rappelé Thierry Laverne, le paysage de la capitale n’est pas que public, il est aussi constitué de nombreux jardins privés. Pour faire évoluer l’aspect d’une ville, il faut donc entraîner les propriétaires privés dans la dynamique.

Luc Abbadie estime que l’enjeu de transition écologique est vital : l’habitabilité de la ville est remise en question aujourd’hui. Les espèces vivantes présentes sont en baisse, ainsi que leur abondance. Les oiseaux communs perdent chaque année 1 % de leurs effectifs, c’est énorme. « Nous allons vers l’extinction de nombreuses espèces, au moins localement. La température monte et les phénomènes extrêmes s’intensifient. » Pour limiter le changement climatique, il faut diminuer les émissions de gaz à effet de serre, consommer moins de sol et d’eau, rendre la ville plus perméable, faciliter la migration des espèces. Et il y a pour lui un enjeu culturel : reconnecter les espaces de nature entre eux alors que le citoyen n’a pas conscience du problème. Et l’une des manières d’y parvenir est de trouver des solutions basées sur la nature, des systèmes gagnant-gagnant où l’arbre occupe une large place et facilite l’infiltration de l’eau, tout en rafraîchissant l’atmosphère et en séquestrant du carbone, en faible quantité mais c’est toujours autant de pris.

Il a rappelé quelques chiffres concernant la baisse de température permise par les arbres dans des « rues canyons », de 3 à 4 degrés Celsius, souligné les bienfaits des toits végétalisés… « Le contrôle de la température dépendra des végétaux qu’on aura plantés. Et la limite administrative des villes ne tient pas : il faudra trouver des partenariats avec l’extérieur », prévient l’enseignant, qui appelle à réfléchir à un métabolisme urbain.

L’exemple du terrain

En présentant quelques aménagements, Thierry Laverne montre comment les discours peuvent devenir réalité. Il travaille sur des toits végétalisés, dont le rôle est important mais qui n’exonèrent pas de planter dans le sol. Il incite à réfléchir à des écosystèmes dynamiques, des espaces de campagne en ville, plutôt que toujours des parcs très esthétiques et peu vivants… Parfois, il suffit de réhabiliter les sols pour que la nature revienne sans qu’il soit nécessaire de planter. « On ne donne pas assez de place à l’histoire naturelle des lieux », regrette-t-il en conclusion.

À défaut de traduire des démarches encore totalement engagées et acceptées, le discours est éclairé et rafraîchissant. Même si les citoyens soulèvent localement des contradictions et que le bâti ne cesse de progresser pour répondre au besoin de loger du monde !

Pascal Fayolle

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