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Académie d'agriculture Une voix de plus qui s'inquiète du choix des arbres pour la ville de demain

Quels sont les arbres qui seront adaptés au climat du futur dans les villes ? L’Académie d’agriculture de France s’est aussi posé cette question dans l’une de ses séances l’an passé…

Comme beaucoup, les membres de l'institution s'interrogent sur la palette végétale dans un climat qui se réchauffe. Alors que 71 % des espèces arborées pourraient être en danger sanitaire en 2050, ils préconisent de diversifier, planter en tranchée ou impliquer les citoyens dans la gestion...

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Si on ne la situe pas forcément en tête des organisations capables de réflexions sur le végétal d’ornement, l’Académie d’agriculture de France, qui se fixe pour mission, entre autres, de « contribuer, dans les domaines scientifique, technique, économique, juridique, social et culturel, à l’évolution de l’agriculture et du monde rural », s’est penchée l’an passé dans l’une de ses séances hebdomadaires* sur le sujet sensible de la place de l’arbre dans la ville du futur, dans un contexte de climat qui évolue et se réchauffe. Elle avait pour l’occasion convié des personnalités très pointues dans le domaine, en particulier deux de ses membres, Philippe Clergeau, professeur émérite du Muséum national d’Histoire naturelle, président du conseil scientifique de Plante & Cité, et Hervé Jactel, directeur de recherche à l'Inrae, président du conseil scientifique de l’Office national des forêts. Mais ont aussi participé d’autres professionnels du secteur, parmi lesquels Frédéric Ségur, qui était encore à l’époque responsable de l’unité arbres et paysage de la Métropole de Lyon (il a depuis créé une structure indépendante d’ingénierie sur la renaturation des villes).

Les villes ont compris les enjeux

L’académie a dévoilé le contenu de cette séance récemment dans l’une de ses lettres mensuelles. Sans surprise, les participants y rappellent que « les arbres permettent la régulation thermique et la lutte contre les îlots de chaleur, par effet d’ombrage et d’évapotranspiration. Les canicules que le changement climatique va multiplier seront ainsi plus faciles à supporter dans les villes si des îlots boisés sont créés. Mais bien d’autres services encore sont rendus par les arbres en milieu urbain… ».

Les chercheurs ont insisté sur le fait que les municipalités ont bien compris l’enjeu et que la plantation de milliers d’arbres est programmée dans de nombreuses communes. « Des stratégies dédiées (plan canopée, plan arbre, plan biodiversité, etc.) sont ainsi élaborées à juste titre mais pourraient bénéficier d’une harmonisation à l’échelle nationale, voire européenne. »

Reste un problème récurrent qui se pose toutefois, « celui du choix d’espèces d’arbres capables de supporter les multiples stress présents en milieu urbain : chaleur et sécheresse accentuées par les surfaces sombres et imperméables, pollution de l’air, compaction des sols, casses et blessures… Ces conditions sont en outre propices au développement de maladies et aux attaques d’insectes. Rappelons également que 90 % des espèces exotiques envahissantes d’insectes ravageurs forestiers sont d’abord détectées en ville ».

Le renouvellement des essences est urgent

Les participants notent qu’une « étude récente estime que, d’ici 2050, 71 % des espèces d’arbres seront en situation de risque sanitaire dans les grandes villes. La question du renouvellement des essences à planter en ville se pose donc ».

Comment y remédier ? Les spécialistes de l’académie constatent sans surprise que « les alignements monospécifiques d’arbres en ville sont une source de vulnérabilité aux aléas climatiques et biotiques. Pour nombre de scientifiques et de gestionnaires, augmenter la diversité des espèces d’arbres apparaît comme le meilleur levier pour éviter la propagation des maladies, restaurer la biodiversité et embellir le paysage urbain. Des efforts d’amélioration dans l’installation et la gestion des arbres doivent être aussi consentis. Plusieurs villes remettent ainsi en cause la fosse de plantation et suggèrent de revenir aux plantations en tranchée qui offrent plus de volume de terre aux arbres et leur permettent des interactions racinaires. Beaucoup également s’interrogent sur la pertinence des microforêts plantées trop denses ou sur la faisabilité d’une agroforesterie urbaine ».

L’arbre n’est pas un mobilier urbain

Enfin, les participants concluent que « l’arbre en ville ne peut être simplement considéré comme un élément de mobilier urbain mais bien comme partie prenante d’un véritable socio-écosystème dont il convient d’assurer l’intégrité et la vitalité pour qu’il fournisse les services indispensables au bien-être des citadins. Pour cela, la France doit rattraper son retard en matière de recherche sur les forêts urbaines et mieux impliquer les citoyens dans la planification et la gestion des futures plantations d’arbres »...

*Cette séance a eu lieu le 22 mars 2022, les interventions sont disponibles ici

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