Durcissement législatif Les professionnels des arbres risquent-ils de devenir des intermittents de l’élagage ?
Pour respecter la biodiversité, la biologie des arbres, les vacances des touristes… les interdictions d’intervenir dans les arbres sont de plus en plus nombreuses. Certains professionnels s’en inquiètent…
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Longtemps animateur du groupe technique métier « élagage » de l’Unep, Union nationale des entreprises du paysage, Pierre Darmanté a lancé récemment une alerte sur « la situation nouvelle créée par un durcissement brutal des conditions d’application de certains textes qui, jusqu’à ce jour, faisaient l’objet de tolérance, laissant aux personnels spécialisés que sont les élagueurs une certaine latitude pour en respecter au mieux l’esprit.
« Dans les marchés publics apparaissent de plus en plus des dates d’interdiction de travail dont l’amplitude ne cesse formellement de s’accroître, période de nidification des oiseaux (mars à juillet), de descente de sève (on attend l’expression de l’amplitude …), période où dans les zones touristiques il est interdit de travailler (deux mois d’été sur la côte landaise...). Ce phénomène vient s’ajouter aux difficultés liées à la gestion de l’habitat d’espèces protégées, compliquées par le fait de trouver des naturalistes sur tout le territoire pour mener les expertises et aider les entreprises et les maîtres d’ouvrage à constituer les dossiers de demande de dérogation auprès des autorités qui, visiblement, n’ont pas aujourd’hui les moyens de les traiter dans un délai raisonnable. »
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Des conséquences sur le métier d’arboristes et sur les entreprises
Et le créateur de l’entreprise Airial élagage, à Morcenx-la-Nouvelle (40), qu’il a aujourd’hui transmise à sa fille de poursuivre : « Il y a urgence à sensibiliser tous les acteurs sur les problèmes générés dans nos entreprises par ce brutal raidissement à obtenir, de la part des services de l’État, un moratoire pournous laisser un peu de temps pour trouver des solutions raisonnables aux nombreux problèmes qu’entraîne cette transformation de notre activité en élagage et abattage. Cette activité va devenir en effet, à terme, si on laisse faire sans réagir, intermittente, et cela va avoir en premier lieu des conséquences sur le métier d’arboriste grimpeur, des salariés ou indépendants qui devront exercer d’autres missions que de l’élagage pendant de longs mois de l’année. Cela concerne les gens en place dans les entreprises dont certains ne pratiquent aujourd’hui que de l’élagage, y compris les indépendants mais également les gens en formation en CS arboriste. Il me paraît donc important que les syndicats de salariés soient dans la boucle, cette affaire les concerne car il faudra peut-être modifier certains contrats de travail. L’avis des centres et des services centraux de la formation, celui de la SFA qui a souvent porté la parole des indépendants sera également intéressant à connaître, ainsi que celui de certains cercles se préoccupant de déontologie et de qualité du travail (Sequoia, Qualiarbre...). Cela aura évidemment des conséquences sur le modèle économique de nombre d’entreprises qui devront étudier les possibilités et les moyens de diversifier leurs activités. »
Que faire du personnel hors des périodes d’élagage ?
Et Pierre Darmanté de lister les risques potentiels pour les professionnels : « Le sujet est vaste, comment une entreprise spécialisée, qui paye plus cher ses salariés qu’une autre non spécialisée, pourra-t-elle rester compétitive ? Que faire du personnel hors des périodes d’élagage ? Sera-t-il possible de mener tous les chantiers dans des périodes aussi réduites ? Comment amortir le matériel ? »
Aujourd’hui, les professionnels spécialisés estiment que les contrôles de la réglementation, en particulier fiscale, sont insuffisants. « Il n’y a aucun contrôle sérieux du travail illégal, de l’application des taux de TVA (il y encore des entreprises qui facturent les abattages à un taux de 10 %), de la réalisation de travaux d’élagage dans le cadre du service à la personne… Certaines entreprises "de passage", l’affichent même dans les flyers distribués dans les boîtes aux lettres des particuliers », s’inquiète Pierre Darmanté. On voit mal comment l’État pourra imposer ces règles à des gens qui n’en respectent aucune et ne sont jamais contrôlés, sauf dans les cas d’escroquerie flagrantes ! »
Autant de questionnements qui, pour le professionnel du Sud-Ouest, suivi par d’autres auprès de qui il a lancé son appel d’alerte, justifient la demande du moratoirepour prendre le temps d’évoquer ce sujet avec tous les acteurs concernés !
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