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Vendre Vers une relance de la filière fleurs coupées françaises ?

L'observatoire de la production française recensait en 2021 278 entreprises spécialisées, cultivant 183 millions de tiges de fleurs, principalement dans les régions Paca et Pays de la Loire.

Le 15 novembre dernier, 70 professionnels ont participé à la journée d'échanges sur les opportunités de relance de la filière, à l'invitation de Valhor et d'Excellence végétale.

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Les fleurs coupées représentent 38 % des achats des Français en végétaux d'ornement, a rappelé Catherine Muller en ouverture de la journée du 15 novembre dernier sur la relance de la filière dans l'Hexagone, à l'institut Agro Rennes-Angers (49). Aujourd'hui affaiblie par les importations en provenance de pays aux faibles coûts de production, la culture peut rebondir à la faveur du renouveau de la demande pour des produits locaux et de saison. La présidente de Valhor a appelé les professionnels à construire ensemble un nouveau projet de filière, en valorisant les opportunités de marché et les forces de chaque métier. Malorie Clair, d'Excellence végétale, a ensuite présenté les trois axes de travail du projet Bleu Blanc Fleurs : mieux connaître et caractériser la production française ; favoriser la valorisation des productions par les labels et certifications ; communiquer et informer les acteurs de la filière

L’émergence d’un nouveau profil d’entreprises confirmé

Des étudiantes de l'institut Agro Rennes-Angers ont travaillé sur la caractérisation de la production française. L'observatoire 2021(1)recense 278 entreprises spécialisées, cultivant 183 millions de tiges de fleurs, principalement dans les régions Paca et Pays de la Loire. Pour compléter ce panorama, les étudiantes ont réalisé une enquête à laquelle 57 producteurs ont répondu. Si ce nombre est trop faible pour en tirer un panorama complet, l'enquête a eu le mérite de confirmer l'émergence d'un nouveau profil d'entreprises, de types « fermes florales », petites structures orientées vers la production d'une large gamme de fleurs de saison en pleine terre (dahlias, pivoine, anémones, tulipes, renoncules, zinnias…), vendues en circuit court. Le Collectif de la fleur française recense déjà 250 fermes de ce type.

Près de 80 % des fleurs vendues en France sont importées, en raison d'un déficit de compétitivité : atomisation de la production, insuffisance de producteurs et de volumes, faible structuration, freins logistiques et coûts de production. L'engouement pour le local est une occasion de rebondir, à condition de lever ces freins et de mobiliser l'ensemble des maillons de la filière. Karine Oswald-Poulet, de l'association Hexavalor, a expliqué en quoi la reconnaissance des groupements horticoles comme organisations de producteurs pouvait être un levier important de structuration, notamment grâce aux aides européennes à leurs programmes opérationnels. Un groupement horticole est aujourd'hui reconnu (Fleuron d'Anjou) et trois autres sont en cours d'instruction.

Innover et répondre aux attentes du marché

L'après-midi était consacré à des échanges en atelier. Le premier était consacré aux besoins d'innovation pour répondre aux attentes du marché et se différencier de l'offre importée. Après une présentation des actions d'anticipation des tendances et de promotion des fleurs et plantes par l'Office hollandais des fleurs, deux obtenteurs ont expliqué le rôle qu'ils pouvaient jouer dans le processus de relance de la filière. La richesse de leurs collections génétiques et leur savoir-faire de sélection offrent un grand potentiel d'innovation et de différenciation, par exemple des roses parfumées issues des collections de rosiers de jardin pour Meilland, la diversité de formes pour les Dahlia des établissements Ernest Turc.
Les professionnels de la production et du commerce ont été invités à exprimer leurs besoins pour guider les travaux de sélection vers les types de fleurs à meilleur potentiel, à la fois au plan commercial et technique, ainsi qu'à participer aux essais afin de valider les nouveautés et d'en définir les meilleurs itinéraires de culture.

Structurer la filière pour mieux exister

Le second atelier était consacré au rôle des grossistes dans la structuration de la filière. Face à une production atomisée et des fleuristes demandeurs d'une grande diversité en petits volumes, David Cabin, gérant de l'entreprise de gros Peigne fleurs, a rappelé le rôle important du grossiste : consolider l'offre et proposer une grande diversité de produits aux détaillants ; optimiser la logistique et offrir des services adaptés aux besoins des fleuristes ; guider les producteurs sur les tendances et leur donner accès à un nombre plus important de clients ; simplifier la commercialisation pour se concentrer sur la production.

Il a rappelé que la structuration de la filière est une des conditions d'une plus grande présence des productions françaises sur le marché. Pour preuve, il a cité la force de la filière néerlandaise, qui repose à la fois sur la spécialisation, la consolidation de la mise sur le marché et la puissance du commerce de gros. Éric Thielin, producteur de fleurs coupées bio près de Laval (2), a expliqué comment il s'était rapproché de Peigne fleurs en complément de sa vente directe. Ce rapprochement s'est concrétisé dans un premier temps par la vente de ses produits lors d'un « marché de producteurs », puis aujourd'hui par un partenariat commercial. Les producteurs ont souligné l'importance de sécuriser leurs ventes, par la contractualisation et la réduction du risque d'impayés. Elle serait également un moyen de renforcer les partenariats.

L'atelier 3, consacré aux besoins des fleuristes, a rappelé que c'est la demande du consommateur qui doit guider les choix de production. Les clients qui achètent chez un fleuriste veulent exprimer une émotion, avec une exigence plus ou moins codifiée selon la destination des achats et les événements. Les fleuristes sont en attente de fleurs fraîches de qualité et de nouveautés, qui les différencient de la grande distribution. Ils sont prêts à jouer le jeu de la traçabilité de l'origine, avec le souhait de mettre en avant le local. Les échanges ont mis en évidence le besoin de rapprocher producteurs et fleuristes, afin de renforcer la compréhension mutuelle des attentes et contraintes de chacun :  connaissance des usages et des tendances par les producteurs, connaissance des gammes (genres, espèces, variétés), des contraintes techniques et des calendriers de production des fleurs françaises par les fleuristes.

Partir des besoins du marché

Enfin, le dernier atelier s'est interrogé sur les stratégies de production à mettre en place en fonction des marchés visés. Laurent Ronco, directeur d'Astredhor Méditerranée, a insisté sur la nécessité de partir des besoins, ainsi que des capacités et contraintes de l'entreprise, pour déterminer un positionnement viable. Il existe plus de 85 espèces de fleurs coupées, feuillages, graminées, rameaux, grâce auxquelles il est possible d'honorer la demande toute l'année. La différenciation peut porter sur des espèces ou présentations innovantes, mais aussi sur la qualité, le calendrier et le processus de production (écoresponsabilité). Le choix de la gamme et des itinéraires techniques doit tenir compte de l'usage prévu – les fleurs vendues à la tige sont mieux valorisées que les fleurs, feuillages et graminées « de remplissage » ou les fleurs destinées à la bouquetterie –, de l'objectif économique et de la maîtrise de l'entreprise (outil, savoir-faire), afin de proposer des volumes de qualité homogène, constante, à coût maîtrisé. Si la technique permet de presque tout faire, une culture dans un outil inadapté, trop cher ou arrivant en dehors des fenêtres de marché, ne sera pas rentable. D'autres critères doivent être retenus comme les contraintes techniques de production (besoins énergétiques, de photopériode, froid…), les disponibilités financières et de main-d'œuvre de l'entreprise.

Mobiliser l’ensemble de la filière

Les stations d'expérimentations horticoles – Astredhor et Créam (3) – sont à même de mettre au point et de proposer des itinéraires techniques adaptés. Sophie Descamps, chargée d'expérimentation à la station Créam, a ainsi présenté les travaux de la station sur les itinéraires techniques et la tenue en vase de fleurs produites selon le cahier des charges de l'agriculture biologique, pour répondre aux besoins de nouveaux acteurs engagées dans cette démarche de production.

Ces échanges ont ouvert de nouvelles perspectives et démontré l'importance d'une mobilisation de l'ensemble de la filière, de la création variétale à la distribution. Cette journée est amenée à être renouvelée chaque année dans différentes régions.

(1) Observatoire des données structurelles des entreprises de l’horticulture et de la pépinière ornementales, AND International pour FranceAgriMer et Valhor, données 2021.
(2) Bio Fleur de soleil à Astillé, dans la Mayenne.
(3) Centre de recherche et d'expérimentations agricoles méditerranéen, de la chambre d'agriculture des Alpes-Maritimes à La Gaude.

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