Dans son premier rapport annuel, l'Observatoire de la formation des prix et des marges des produits alimentaires dénonce les marges très élevées (voire aberrantes) pratiquées par la grande distribution. Dotés d'une force de communication très puissante, les accusés réagissent et expliquent dans tous les médias qu'ils se battent au quotidien pour faire bénéficier les consommateurs du meilleur prix. Malgré le rapport, le sujet reste polémique. Les conclusions de l'Observatoire devraient toutefois obliger les pouvoirs publics à renouveler de manière plus appuyée leur timide engagement à rééquilibrer le rapport de force entre un commerce très concentré, qui n'a aucune raison de ne pas user de sa position dominante, et une production plus dispersée et donc moins facile à organiser (*).
Au-delà de ce débat, le modèle change avec la montée en puissance de la vente directe sur les lieux de production ou via internet. Concernant notre filière, ce commerce en circuit court devient « la solution » pour un nombre croissant d'entreprises qui décrochent de leur activité d'expédition. Les dernières campagnes particulièrement tumultueuses ont donné une prime à la souplesse permise par ces circuits courts. Internet favorise également ce mouvement en permettant aux producteurs de livrer des informations qui créent un lien privilégié avec des consommateurs sensibles au contact direct avec un spécialiste. Après le renforcement de l'attractivité du point de vente, ce lien peut également permettre de lancer une activité de vente par correspondance.
L'exaspération des producteurs face à la toute-puissance du commerce, croisée avec le potentiel des circuits courts dopés au web, laisse présager une nouvelle distribution des cartes plus favorable aux producteurs.
PAR FRANCIS GINESTET
(*) À lire sur ce sujet le livre de Pierre Prioret, un arboriculteur du Vaucluse, « Les fruits de ma colère : plaidoyer pour un monde paysan qu'on assassine » (Éditions Robert Laffont).