Formation professionnelle : embaucherun apprenti, cela s'apprend et se prépare
Le gouvernement n'échappe pas à la tradition de ses prédécesseurs, il souhaite relancer l'apprentissage. Et l'agriculture apparaît naturellement comme un vivier important. Une réforme majeurede la formation professionnelle doit être adoptée dès cet étépour entrer progressivement en vigueur à partir de janvier 2019.
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Rédiger un contrat d'apprentissage, cela s'apprend... Il n'en demeure pas moins que cela requiert des compétences spécifiques et nécessite une bonne préparation du côté de l'employeur. Ce contrat d'apprentissage, c'est un contrat de travail avec quelques spécificités. Même si le statut de l'apprenti reste particulier, ce dernier est un salarié à part entière, titulaire d'un contrat de travail. S'ils peuvent être recrutés directement en CDI (contrat à durée indéterminée), la grande majorité des apprentis débutent sous CDD (contrat à durée déterminée) qui peut varier entre un et trois ans en fonction du temps de formation nécessaire et du type de qualification préparée. Des dérogations sont possibles pour raccourcir ou allonger cette durée. En principe, le contrat est réservé aux jeunes âgés de 16 à 25 ans. Plusieurs dérogations sont néanmoins prévues par le code du travail, ouvrant ainsi très largement l'accès à ce mode de formation par alternance. Outre l'application du droit commun des contrats de travail et de la convention collective, certaines règles spécifiques aux apprentis doivent être parfaitement appréhendées par les employeurs avant de se lancer pour la première fois, notamment la durée du travail pour les apprentis mineurs et le cas de la rupture anticipée du contrat.
Apprentis mineurs
QUELLE DURÉE DU TRAVAIL ?
Le temps de travail maximal applicable aux apprentis de moins de 18 ans est plafonné à 8 heures par jour, dans la limite de 35 heures par semaine. Par dérogation, un accord de l'inspection du travail accompagné d'un avis conforme du médecin du travail peuvent permettre à l'apprenti mineur d'effectuer jusqu'à 5 heures supplémentaires par semaine. Cette limite peut parfois poser des difficultés d'organisation lorsqu'en période de haute activité les entreprises sont amenées à réaliser des heures supplémentaires au-delà de ce plafond. Car pour rappel, un salarié peut travailler jusqu'à 48 heures par semaine en période de pointe. L'employeur doit alors articuler le temps de travail de l'apprenti avec celui de ses équipes pour ne pas dépasser les limites autorisées. Il est donc conseillé de bien anticiper les demandes de dérogations auprès de l'inspection et du médecin du travail si des heures supplémentaires sont à prévoir dans les équipes. À noter que les apprentis majeurs sont soumis aux mêmes règles de durée de travail que les autres salariés et peuvent donc effectuer des heures supplémentaires sans qu'aucune autorisation préalable ne soit obligatoire.
Rupture anticipée du contrat
LES MODALITÉS À SUIVRE
Comme dans tout CDD, il arrive que le contrat d'apprentissage ne puisse malheureusement pas aller jusqu'à son terme. Des procédures spécifiques de rupture anticipée sont prévues par le code du travail. Le contrat peut être librement rompu par l'une ou l'autre des parties jusqu'à l'échéance des 45 premiers jours, consécutifs ou non, de formation en entreprise. Cette période s'apprécie sur la présence effective dans l'entreprise, sans tenir compte du temps passé au centre de formation. Cette résiliation anticipée n'est alors subordonnée à aucun motif particulier. Elle doit cependant être rédigée par écrit et notifiée au directeur du CFA (centre de formation d'apprentis) ainsi qu'au service ayant enregistré le contrat. Les employeurs doivent donc prévoir un premier bilan avant le terme des 45 premiers jours pour appréhender la suite et, le cas échéant, envisager une rupture anticipée si la relation n'est plus satisfaisante. Passé ce délai des 45 premiers jours en entreprise, la résiliation anticipée du contrat ne peut plus intervenir que par accord exprès des cosignataires du contrat.
En revanche, si les parties ne parviennent pas à tomber d'accord pour une séparation à l'amiable, seul le conseil de prud'hommes peut prononcer la rupture anticipée du contrat. Mais il devra pour cela constater l'existence d'une faute grave ou a minima de manquements répétés de l'une des parties à ses obligations contractuelles. Ces situations sont alors bien plus difficiles à gérer.
Enfin, l'apprenti peut résilier unilatéralement son contrat avant son terme en cas d'obtention du diplôme ou du titre préparé. Il doit alors en informer son employeur par écrit, au minimum deux mois à l'avance. Ce cas se présente notamment lorsque le diplôme est obtenu en juin et que le contrat se termine fin août.
Des incitations financières
EMPLOYEUR ET SALARIÉ BÉNÉFICIAIRES
Pour favoriser l'apprentissage, des incitations financières directes sont prévues par l'État et par les Régions (qui disposent des compétences en la matière). L'employeur bénéficie par ailleurs d'une exonération conséquente des charges patronales sur les salaires versés. Les cotisations ainsi exonérées varient selon que l'entreprise compte plus ou moins de 11 salariés. L'apprenti, pour sa part, ne supporte pas de charges salariales à l'exception de la retraite complémentaire et de la mutuelle.
Ce que prévoit la réforme
REGROUPER LES DISPOSITIFS
Alors que jusqu'à présent la formation continue et l'apprentissage étaient gérés séparément, la ministre du Travail prévoit de regrouper les deux dispositifs pour une meilleure efficacité. Une cotisation unique sera instaurée progressivement entre 2020 et 2024. Elle devrait être collectée par la MSA (Mutualité sociale agricole) ou les Urssaf (Unions de recouvrement des cotisations de Sécurité sociale et d'allocations familiales). De plus, le projet envisage un nouveau mode de financement des centres de formation « au contrat », à compter du 1er janvier 2020. Les actuels fonds de formation (Fonds national assurance formation des salariés des exploitations et entreprises agricoles, FAFSEA, en production agricole) devraient désormais avoir en charge la promotion et le développement des contrats d'apprentissage. Il faudra certainement attendre quelques années pour mesurer l'efficience de la réforme.
Par Murielle Vandevelde, avocate spécialisée en droit social agricole
http://www.vandeveldeavocats.com
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