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CDD : un contrat à bien tracer !

Derrière son apparence simplifiée, le contrat à durée déterminée impose la plus grande vigilance dans sa rédaction. Car il est potentiellement source de contentieux.Muriel Vandevelde

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L’arrivée du printemps rime avec recours aux contrats à durée déter­minée ou « CDD », pour que les exploitations puissent accomplir les travaux de saison. Explorons ici les clauses obligatoires. Un accent est porté sur les risques de sanctions et pénalités – en cas de li­tiges et, potentiellement, lors d’un contrôle – rencontrés sur le terrain.

1Un contrat obligatoirement écrit…

Quelle que soit sa durée, le CDD est obligatoirement écrit. Même s’il n’est conclu que pour quelques jours, voire une seule journée.

La rédaction obligatoire d’un écrit vaut non seu­lement pour le contrat initial, mais également pour son éventuel renouvellement.

Et si tel n’est pas le cas et qu’un litige éclate, la sanction prévue par l’article L1242-12 du Code du travail est alors immédiate : l’absence d’écrit engendre une requalification du CDD en contrat à durée indéterminée.

L’administration et la Cour de cassation consi­dèrent que, dans ce cas, l’employeur ne peut apporter aucune preuve contraire. À défaut d’écrit, la condamnation est donc certaine.

Ce mécanisme de « requalification sanction » ne signifie toutefois pas que l’exploitation devra ré­intégrer­ le salarié dans son effectif. Elle se traduit par le versement d’une indemnité forfaitaire au moins égale à un mois de salaire.

Si un saisonnier travaille même une seule journée, on doit quand même le licencier, et ceci à chaque fin de CDD. À cette sanction civile – prononcée par le conseil de prud’hommes – peut s’ajouter une amende pénale­ d’un montant de 3 750 euros (qui peut être porté à 7 500 euros en cas de récidive).

2...comprenant le motif, la saison, le poste, la durée minimale…

Outre la rédaction par écrit, la réglementation sur les CDD impose de nombreuses clauses absolument obligatoires, parmi lesquelles la précision du motif.

Pour rappel, tout CDD doit comporter un motif précis, qu’il s’agisse de travaux saisonniers, d’un accroissement temporaire d’activité ou encore du remplacement d’un salarié temporairement absent (article L1242-2 du Code du travail).

Les règles en la matière sont très strictes.

Par exemple, la seule mention de « contrat saisonnier » est insuffisante. L’employeur est tenu de préciser dans le corps du contrat de quelle saison­ il s’agit et pour quel emploi exact le salarié est recruté­.

Attention, donc, car ne pas définir le motif avec suffisamment de précision peut donner lieu à la même sanction d’un mois de salaire minimum prononcée par le conseil de prud’hommes.

Il en va de même de l’absence de mentions obli­gatoires telles que la durée minimale pour les CDD à terme imprécis souvent utilisés lors des récoltes. C’est sur ce type de contrats saisonniers que les contentieux sont les plus fréquents.

Le salarié est recruté pour une saison dont l’employeur ne connaît pas précisément le terme. En fonction de la météo, de l’avancée des travaux ou encore des commandes, la date précise de fin de contrat est imprévisible au jour de l’embauche.

Il est alors obligatoire de garantir une durée minimale d’emploi. Mais si celle-ci n’est pas clairement inscrite dans le CDD, il encourt alors la requalification en CDI. Et à nouveau une sanction d’un mois de salaire minimum.

À noter : ces obligations de forme valent également en cas de recours au titre emploi simplifié agricole (Tesa). La simplicité du dispositif n’exonère pas pour autant l’employeur de ses obligations. Bien au contraire.

3à remettre à la personne dans les deux jours suivant l’embauche...

L’employeur doit transmettre au salarié le contrat écrit au plus tard dans les deux jours ouvrables suivant l’embauche. C’est-à-dire à compter de la date d’entrée en poste. Et il s’agit bien de deux jours pleins, ce qui signifie que le jour même de l’embauche ne compte pas dans le délai.

Mais si ce délai n’est pas respecté, alors l’employeur sera passible de la sanction d’un mois de salaire minimum.

4et dont la duréeest limitée

Comme son nom l’indique, le CDD est toujours conclu pour une durée « déterminée ». Celle-ci est variable selon le type de CDD. S’agissant des contrats saisonniers, leur durée doit être cohérente avec la saison et le poste pour lequel le salarié est recruté. Sans dépasser huit mois continus pour les saisons les plus longues.

Mais si cette durée maximale est dépassée, la requalification est encourue. Avec toujours une indemnité minimum d’un mois de salaire.

5.Un jugement sans conciliation

Ces exemples ne sont pas exhaustifs mais cor­respondent aux situations récurrentes de contentieux. Ils présentent tous un point commun : le conseil de prud’hommes peut être amené à prononcer une « requali­fication sanction » qui se traduit, en argent, par le versement d’une indemnité­ au moins égale à un mois de salaire.

La procédure est accélérée puisque l’affaire peut se traiter directement en bureau de jugement, sans qu’il y ait de phase préalable de concilia­tion, qui est propre à la procédure prud’homale.

6.Potentielles sanctions de licenciement abusif

Mais le raisonnement juridique va au-delà. S’il y a requalification en CDI, prononcée par le juge lors de la rupture ou de l’arrivée du terme du CDD, cela signifie que l’employeur aurait donc dû prononcer­ un licenciement s’il avait respecté les règles de fond et de forme propres à cette procédure… Ce qu’il n’a pas fait puisqu’il considérait son salarié en CDD et non pas en CDI.

La rupture du CDD – requalifiée en CDI – est donc, dans le prolongement du raisonnement, considérée comme irrégulière et injustifiée.

À l’indemnité minimum d’un mois de salaire, liée à la requalification initiale, pourraient venir s’ajouter les sommes dues en cas de licenciement abusif : indemnité de licenciement, indemnité de préavis, indemnité de rupture abusive.

La saison ne se prépare donc pas uniquement sur le terrain. Une bonne révision des règles de fond et de forme du CDD s’impose avant de se lancer !

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