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SÉCURITÉ Attention aux risques électriques en paysage

Si les élagueurs sont généralement bien informés des risques des interventions aux abords de lignes à haute tension, les autres professionnels du paysage ne perçoivent pas toujours les conséquences graves, voire mortelles, des chantiers qui ne respectent pas les distances réglementaires.ENEDIS

À la suite d'accidents survenus sur son territoire et forte de la convention nationale signée, en 2010, entre Enedis (ex-ERDF) et la caisse centrale de la MSA, la MSA des Charentes a développé des actions et partenariats pour sensibiliser les professionnels sur les risques liés aux travaux réalisés à proximité des lignes électriques.

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Dès son arrivée au sein de la MSA des Charentes en 2008, Angélique Pierre, responsable prévention, a été confrontée à un accident mortel qui l'a alertée sur la problématique des risques liés à la réalisation de travaux à proximité de lignes électriques et touchant des entreprises du paysage. C'est pour améliorer la situation qu'elle a mis en place différentes actions en partenariat avec Christophe Paris, le représentant régional d'Enedis (ex-ERDF). « Si les accidents de personnes sont rares pour les spécialistes de l'élagage, car ils sont généralement bien informés sur les risques encourus, il n'en est pas de même pour les autres professionnels du secteur du paysage. Des accidents surviennent chaque année avec parfois des conséquences graves, voire mortelles. Dans notre région, nous rencontrons beaucoup de petites structures qui sont polyvalentes, réalisant à la fois des travaux d'entretien et d'aménagement. Elles connaissent bien leur métier mais n'ont pas toujours conscience des risques liés à un environnement spécifique comme la présence d'un réseau électrique à proximité du chantier sur lequel elles opèrent. L'exemple de l'incident survenu en avril 2014 (ci-dessous) en témoigne », explique Angélique Pierre.

Il y a danger même sans toucher les lignes

MD a créé son entreprise en 2006 après quelques années d'expériences comme salarié. Il emploie un ouvrier et réalise essentiellement des travaux d'entretien (tonte, taille, débroussaillage), ainsi que quelques créations de massifs pour des particuliers et des entreprises locales. Le jour de l'accident, les deux protagonistes sont venus chez une cliente pour élaguer deux branches d'un saule qui poussent en direction de la ligne à haute tension (20 000 volts) située non loin de là (7, 35 m au-dessus du sol). Cette intervention avait été programmée pour l'automne, mais en travaillant sur un autre chantier à proximité, le paysagiste a estimé que les deux branches en question n'attendraient pas cette date. Il décide alors de stopper le chantier en cours pour aller élaguer les branches, une tâche qu'il pensait rapide à mener. Auparavant, une entreprise prestataire d'Enedis avait proposé à cette cliente de réaliser ce travail dans le cadre de son programme annuel d'élagage, mais celle-ci avait refusé le devis et préféré faire appel à son paysagiste qui n'avait pas été informé du passage de la société spécialisée. En effet, la cliente ne lui a rien dit car elle confiera plus tard avoir été méfiante vis-à-vis de la qualité des prestations proposées par les prestataires d'Enedis, chargés d'intervenir uniquement sur la partie des arbres concernée par la mise en sécurité sans réaliser, si nécessaire, une mise en forme harmonieuse de l'ensemble du sujet, qui reste à la charge du propriétaire. Elle a donc accepté la proposition du paysagiste d'intervenir immédiatement. Une échelle a été apposée au pied de l'arbre et tenue par le chef d'entreprise, afin que le salarié puisse grimper, à une hauteur estimée à environ 2,50 m, pour couper les deux branches à l'aide d'un échenilloir.

Mais la deuxième branche est restée coincée et l'ouvrier a utilisé son matériel pour secouer la branche sur laquelle l'élément coupé était retenu. C'est alors que l'échenilloir est entré dans la zone d'amorçage, à quelques dizaines de centimètres de la ligne. Car lorsque l'on s'approche d'une ligne haute tension, un arc électrique peut se former, - même sans contact direct -, avec un risque d'électrisation ou d'électrocution pouvant entraîner des brûlures, un arrêt cardiaque, un coma, une asphyxie et même la mort. Les deux professionnels se sont retrouvés projetés au sol et l'échelle est tombée. Le chef d'entreprise n'ayant pas perdu connaissance, il s'est précipité au secours de son salarié inconscient et a appelé immédiatement le Samu, ce qui a permis une prise en charge rapide. S'il n'a subi qu'une brûlure sans gravité à une main, il n'en est pas de même pour son salarié qui a été blessé aux deux mains (points d'entrée du courant) et aux mollets (points de sortie) avec des brûlures au deuxième degré et au troisième, ayant nécessité pour la main droite une greffe. Le salarié est resté en arrêt de travail d'avril à décembre. « Le chef d'entreprise et son salarié ont été fortement choqués. Consciencieux et globalement attentifs aux risques d'accidents liés par exemple à l'utilisation d'outils tranchants ou de produits phytosanitaires, ils avouent avoir sous-estimé les risques électriques et méconnaître les règles liées au travail à proximité des réseaux. C'est ce type de situation qui nous a incités à développer les actions de sensibilisation et de prévention auprès de nos adhérents ces dernières années », souligne Angélique Pierre.

Soixante personnes formées à l'habilitation électrique HO-BO

Depuis 2010, la caisse centrale de la MSA (CCMSA) et Enedis ont signé une convention de partenariat visant à développer des actions de sensibilisation et de prévention communes en direction du monde agricole concernant les risques électriques. Elle s'appuie notamment sur l'organisation de journées d'informations auprès des étudiants, la formation des conseillers en prévention des caisses de la MSA, l'analyse commune des accidents, la détection des sites à risques dans le secteur agricole et paysager. Au niveau de la caisse des Charentes, une convention a été signée entre les acteurs locaux en 2012 et a été renouvelée en 2015 afin de poursuivre une démarche engagée depuis plusieurs années, précisent Angélique Pierre et Christophe Paris.

« En effet, entre 2009 et 2011, la MSA a organisé six formations, permettant l'habilitation électrique H0-B0 (premier niveau), de deux jours pour 60 personnes au total. Et depuis 2012, nous organisons en partenariat avec Enedis une journée annuelle commune de sensibilisation sur les risques électriques à destination des professionnels du paysage. Elle s'articule autour d'une partie en salle pour prendre connaissance de la réglementation en vigueur et d'une demi-journée suivie sur le terrain pour permettre d'observer concrètement des situations à risque. Nous insistons notamment sur les outils télescopiques qui ne permettent pas toujours une maîtrise précise du geste et avec lesquels il est souvent difficile d'estimer le rayon d'action. Au cours de la journée organisée en 2015, le salarié blessé au mois d'avril 2014 est venu témoigner. La MSA et Enedis interviennent également régulièrement dans les lycées agricoles de la région, dans les formations de niveau bac pro ou BTS "aménagements paysagers". À cette occasion, la presse locale est invitée et s'en fait régulièrement l'écho. »

Yaël Haddad

ODILE MAILLARD

Enedis (ex-ERDF)organise des journées de sensibilisation, ici auprès de professionnels en Charente.

MSA DES CHARENTES

Angélique Pierre, responsable prévention à la MSA des Charentes, et Christophe Paris, représentant régional d'Enedis (ex-ERDF).

YAËL HADDAD

Sur le manche de cet échenilloir, on distingue les traces noires de sortie du courant.

MSA DES CHARENTES

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