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S'adapter, la clé d'une reprise réussie ?

Jean-Paul Davasse : « J'avais le choix entre créer une structure ou en reprendre une qui existait. J'ai préféré la seconde option. »PHOTO : PASCAL FAYOLLE

Après avoir été longtemps salarié, Jean-Paul Davasse a repris en 2011 les pépinières Didier Boos. Depuis, le marché a considérablement évolué et la gamme a dû être adaptée, tant au niveau des produits que des conditionnements.

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Prendre une entreprise avec ses atouts et ses contraintes pour en faire une unité de production adaptée au marché, tel est le lot de tout repreneur. C'est ce qu'a vécu Jean-Paul Davasse, devenu en 2011 chef d'entreprise en récupérant les pépinières Didier Boos, à Sainte-Gemmes-sur-Loire, près d'Angers (49). Un choix personnel et passionnel après de nombreuses années passées en tant que cadre et dirigeant au sein des pepinières Minier. « J'avais la possibilité de créer une structure ou d'en reprendre une qui existait, explique-t-il. J'ai préféré la seconde option, ce qui oblige à accepter les divers paramètres de la société concernée, mais je voulais travailler sur la diversité et avoir le contact avec le public, ce qu'offrait la reprise de cette pépinière », précise Jean-Paul Davasse.

De multiples atouts

COLLECTION RECONNUE PAR LE CCVS, SAVOIR-FAIRE, CLIMAT TEMPÉRÉ

Les atouts de Boos Hortensia, le nouveau nom de l'entreprise, c'est d'abord une collection rassemblée à partir des années 1980. Au fil du temps, la collection est devenue la référence nationale reconnue par le Conservatoire des collections végétales spécialisées (CCVS). Aujourd'hui, les pieds-mères sont régulièrement enrichis de nouveautés, comme Hydrangea macrophylla 'Wedding Gown', récompensé au salon Plantarium de Boskoop (Pays-Bas) mais également à Courson-Monteloup (91). Les relations avec les obtenteurs et désormais aussi la création « maison » permet de tester 10 à 20 nouveautés par an.

Autre atout de l'entreprise, un savoir-faire et un climat qui offrent des avantages sur les principaux producteurs que sont les pays nord européens. En effet, une large part des hortensias disponibles sur le marché sont forcés. Ils sont placés au frigo en début d'automne, laissé à 2 °C, puis vendus à des producteurs qui vont les amener à fleurs, pour la Saint-Valentin, par exemple. Or, le climat angevin permet la mise au frigo de plantes plus qualitatives que dans le Nord : « Là-bas, le cycle végétatif est plus court. Les professionnels doivent rentrer leurs végétaux au frigo dès la mi-septembre et ne les installer à l'extérieur qu'en juin. Ici, nous commençons la production directement à l'extérieur fin avril début mai. Nous pouvons la rentrer plus tard, en octobre. Du coup, les plantes sont plus lignifiées et ont des tiges plus grosses. Elles supportent mieux le frigo et nous pouvons servir nos clients plus tardivement », explique Jean-Paul Davasse. Les variétés réservées au forçage sont en grande partie classiques, mais on y trouve aussi quelques variétés nouvelles.

Des évolutions notables

CHUTE DES QUANTITÉS VENDUES, ACHATS EN DIRECT EN BAISSE, EXPORTATIONS STOPPÉES

Mais à partir de la reprise de l'entreprise, le marché a considérablement évolué. En particulier sur le fameux marché des plantes à forcer. « Aujourd'hui, les clients qui prenaient plus de 3 000 sujets d'un coup sont devenus plus rares, explique Jean-Paul Davasse. Il reste quelques gros clients, des tout petits, et le marché de l'export. » Il faut dire que la culture demande à être chauffée...

Autre évolution notable, les jardineries indépendantes sont de moins en moins nombreuses. Résultat, les points de vente ont davantage de difficultés à acheter en direct et à valoriser des produits de collection qui doivent être vendus deux fois plus cher que les hortensias classiques.

Enfin, le troisième point porte sur l'exportation : au moment du rachat, l'entreprise exportait vers le Liban ou la Syrie, entre autres, pour des rendez-vous comme la fête des Mères. Un marché que les événements géopolitiques de ces dernières années ont évidemment stoppé.

Des adaptations successives

GAMME DIVERSIFIÉE, VARIÉTÉS NOUVELLES, VENTE DE PLANTES EN ALVÉOLES RACINÉES

Face à ces évolutions, l'entreprise s'est adaptée. Tout d'abord en diminuant la quantité de pots de 2 l en production et en renforçant la présence de variétés nouvelles dans la gamme. Aujourd'hui, sur les 350 taxons de la collection, 200 sont commercialisés, souvent en petites séries, parfois 300 exemplaires. Les plus grosses séries sont composées de 10 000 plantes. Les conteneurs de 2 l ont en partie été remplacés par des pots de 14 cm, qui correspondent mieux à la vente aux professionnels, et une culture de pots de 12 cm a été mise en place pour fournir la vente par correspondance (VPC), sur laquelle l'accent a été mis. « Pour la VPC, le pot de 2 l est trop gros et trop cher à expédier », justifie Jean-Paul Davasse.

Autre évolution majeure, la vente de plantes en alvéoles racinées, que l'entreprise ne commercialisait qu'à toute petite dose. En parallèle, les pots de 3 et 7 l ont été poussés dans les variétés originales. « L'idée, c'est de proposer à différents types de clients des gammes qui leur sont adaptées, de faire un peu de sur-mesure », poursuit Jean-Paul Davasse. Aujourd'hui, Boos Hortensia vend 85 % de sa production à des professionnels, parmi lesquels 65 % de producteurs, le reste se répartissant entre grossistes et jardineries. Les 15 % de chiffre d'affaires restant sont réalisés en vente aux particuliers, via la boutique Internet, la vente sur le site de production et des foires aux plantes « intéressantes parce qu'elles permettent de voir la réaction du public. J'ai présenté récemment des variétés striées, avec lesquelles je pensais faire un tabac, mais l'accueil du public est resté mitigé. Après, sur les foires, il y a des facteurs qui orientent les ventes. S'il fait beau, nous vendons davantage de couleurs soutenues, s'il fait gris, plus de pastels... » Mais il faut les gérer dans des périodes où la charge de travail est lourde. L'accent mis sur les variétés nouvelles permet de renforcer aussi l'intérêt de certains professionnels du paysage qui savent qu'ils pourront trouver des végétaux peu communs pour leurs clients particuliers. Mais cela a aussi ouvert de nouveaux marchés, comme celui de la Russie, où « je ne vends que de l'original ». C'est la diversité de la gamme variétale et des conditionnements proposés qui permet de toucher différents débouchés.

Des solutions d'avenir

PROJET D'EXTENSION, RÉPONDRE PRÉCISÉMENT AUX CLIENTS, RESTER CONFIANT

Avec 2 salariés et des saisonniers, soit 5 équivalents temps plein (ETP), l'entreprise de Sainte-Gemmes-sur-Loire réalise aujourd'hui entre 420 000 et 440 000 euros de chiffre d'affaires par an. Contre 660 000 euros au moment de la reprise de l'établissement, avec une structure à présent plus importante. « Un chiffre que j'espérais maintenir », précise Jean-Paul Davasse. Mais la conjoncture est passée par là. Avec un produit qui permet d'étaler les ventes, d'éviter le problème de concentration sur quelques semaines, comme c'est le cas pour les plantes à massifs, le chef d'entreprise reste confiant. À moyen terme, le projet de Boos Hortensia est de réaliser une nouvelle aire de culture pour y présenter au public des plantes en fleurs en été : les aires de culture sont aujourd'hui éloignées des serres et du siège social. La galerie de la serre est utlisée pour exposer des végétaux, mais aussi accueillirle magasin et la zone de forçage...

« Pour faire face à l'avenir, nous devons répondre de plus en plus précisément aux clients, qu'ils soient amateurs ou professionnels », affirme le chef d'entreprise. Une maxime qui n'a jamais été aussi vraie !

Pascal Fayolle

Les pieds-mères de la collection nationale d'hortensias reconnue par le CCVS. Ce sont eux qui permettent de tester de nouvelles variétés.

PASCAL FAYOLLE

Les pots de 3 et 7 l ont été développés dans des variétés originales afin de proposer des gammes correspondant à différents types de clients.

PHOTO : PASCAL FAYOLLE

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