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Plantes de services Allier lutte « zéro phyto » et biodiversité

Pour aider les producteurs à mieux comprendre la complexité des relations entre cultures, ravageurs, auxiliaires et plantes de service, Émilie Maugin a su captiver son auditoire. Il s’agit de comprendre comment un insecte perçoit les couleurs, apprécie ou pas les odeurs des plantes ou des huiles essentielles... ©O. Maillard

Pour ses portes ouvertes 2021, la station Astredhor Sud-Ouest a choisi d’aider les producteurs à mieux comprendre les enjeux mais aussi la complexité dans l’utilisation des plantes dites « de services ». Une thématique qui engage plusieurs programmes d’expérimentation.

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« Pour me protéger des insectes ravageurs, j’avais appris qu’il fallait faire place nette (cailloux, macadam…) autour de mes serres : dois-je vraiment changer du tout au tout ? » ; « Si j’apporte de la biodiversité au sein de mes cultures, comment être sûr que je ne vais pas aussi attirer des ravageurs ? »…

Les questions pointues n’ont pas manqué durant les portes ouvertes de la station Astredhor Sud-Ouest GIE Fleurs et Plantes à Villenave-d’Ornon (33) le mercredi 8 septembre autour des plantes dites « de services ». Car l’option radicale de passer au « zéro phyto » inquiète et utiliser des plantes amies remet en cause les certitudes acquises de longue date, bouscule les pratiques et suscite encore de nombreuses interrogations. C’est normal car, en horticulture plus qu’en maraîchage, les solutions sont encore en début d’expérimentation si l’on regarde l’approche globale des systèmes, dans chaque culture. Beaucoup plus complexe que de programmer une « recette de traitement chimique ». Plus difficile à gérer que d’apporter au cas par cas un auxiliaire acheté.

Comprendre comment un insecte voit et sent pour mieux le piéger

Ces plantes de services, Émilie Maugin, ingénieure de recherche à la station GIE, a réussi à en faire mesurer toute la complexité. Emmenant son auditoire à se mettre dans la peau d’un insecte ravageur (thrips, puceron), elle a abordé un grand nombre de facteurs influant sur leur attractivité ou leur répulsivité. Comment un insecte perçoit les couleurs, par exemple (finalement très mal chez les pucerons), combien il est réceptif aux fragrances (composés volatils des feuillages ou floraisons, huiles essentielles, composés de synthèse…). Les connaissances, appliquées aux cultures horticoles, peuvent permettre de provoquer un effet de barrière, ou de piège, ou masquer d’autres odeurs… Une difficulté majeure : entre deux espèces du même ravageur, et à différents stades de développement, les réactions se montrent bien différentes, voire spécifiques. Il en va de même pour l’appétence des plantes, qu’elles soient des productions ornementales ou des plantes de services apportées pour héberger des auxiliaires ou pour détourner l’attention des ravageurs.
Concrètement, via le projet Helthi, terminé en 2020, les équipes de la station ont travaillé en particulier sur le potentiel utile des huiles essentielles dans les stratégies de lutte alternative contre les thrips. Reste un problème d’absence d’homologations quand une efficacité a été prouvée.

Autre programme : PicPus pour la recherche de plantes d’intérêt contre les pucerons, dans des cultures de chrysanthèmes. Ont été finalement retenues pour la poursuite des essais : basilic, tagette, romarin et sauge. Sachant que les soucis (Calendula) ont déjà souvent fait leurs preuves dans les stratégies. Les participants à la journée portes ouvertes ont reçu une petite barquette de jeunes plants pour débuter leurs propres essais dans leurs entreprises, avec invitation à partager leurs retours d’expérience.

À la recherche de solutions agroécologiques

Les ingénieurs de recherche Robin Champenois et Nicolas Guibert ont quant à eux expliqué leurs expérimentations. Les programmes Dephy Expe « Hortipepi 2 » en plantes grimpantes cultivées en pots et Dephy Expe « Hortipot 2 » sur chrysanthèmes sont programmés jusqu’en 2023.
Ils visent à mettre au point des itinéraires culturaux innovants en pépinière hors sol, à partir de différents leviers agroécologiques, dont les plantes de services.

Dans Hortipepi 2, des résultats encourageants sont notés contre l’acarien Phytoseiulus persimilis et plutôt décevants contre cochenilles. Pour Hortipot 2, les travaux sont à poursuivre, l’intérêt de plantes fleuries ayant montré du potentiel dans la lutte contre les pucerons sur chrysanthèmes.

Le logiciel S@m est lui aussi à l’essai pour aider au suivi des dynamiques de bioagresseurs et d’auxiliaires. Il ne semble pas encore à la portée des entreprises pour l’instant. Le programme logiciel doit être optimisé pour les contextes horticoles.

Les participants ont soulevé aussi le problème de fourmis (« éleveuses » de pucerons) qui deviennent parfois problématiques. Sans avoir de solution pertinente pour l’instant.

Mélanges fleuris : un cocktail à doser et affiner

Un autre essai se base sur l’utilisation de mélanges fleuris près des cultures de pépinière (au pied, en bordures de champ, en îlots au milieu des planches…) : que se passe-t-il vraiment entre auxiliaires et ravageurs ? Qui domine qui ? Comment trouver le meilleur dosage dans la composition en végétaux ? Pour appréhender cette complexité et amener peu à peu des stratégies plus fiables, un long chemin reste à parcourir. Les expérimentations se poursuivent pour au moins trois ans, à la station comme dans certaines pépinières.

Pour toutes ces problématiques, les portes ouvertes annuelles des stations d’expérimentation restent le meilleur moyen de se faire son propre jugement au regard de sa situation personnelle, et pour demander des conseils directs auprès des techniciens et ingénieurs.

Odile Maillard

Plus d’infos sur les plantes de services :
- dans Phytoma n° 746 d’août-septembre 2021 « Plantes de service et bioagresseurs : des services à cultiver pas à pas » ;
- sur le site du GIE.

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