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Manifestations L’horticulture aux côtés des agriculteurs en colère

« Nous sommes de ceux qui façonnent les paysages, qui créent des terrains fertiles pour la biodiversité en ville comme à la campagne, qui participent à rendre notre monde plus viable. Pour autant notre voix reste inaudible et notre travail n’est pas rémunéré à sa juste valeur », rappellent les horticulteurs, eux aussi en colère.

S’ils ne le proclament pas aussi fort, les producteurs de l’horticulture ornementale se retrouvent dans les problèmes de fond rencontrés par les agriculteurs. Premières réactions.

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Les horticulteurs et pépiniéristes ne sont pas en première ligne des dernières manifestations d’agriculteurs en colère, ni à la une des médias nationaux, mais ils soutiennent nombre de leurs revendications, à quelques spécificités près.

Les premières prises de position arrivent : « Les revendications sont bien sûr les mêmes : gazole non routier (GNR), Certiphyto/CSP, zones de non-traitement (ZNT) vis-à-vis des riverains et promeneurs… »

Une législation égale entre pays concernant les phytos et les végétaux importés est estimée indispensable. Les impasses techniques sont problématiques sans recours aux produits phytosanitaires. Sans oublier la transmission des entreprises et la loi sur l’eau (nécessité d’irriguer)… 

Parmi les autres soucis transversaux, on retrouve les besoins de valoriser les achats locaux et la vente directe par les Français, de favoriser la transparence, la traçabilité et la lisibilité sur les produits vendus, la loi Egalim – notamment dans le cadre des marchés publics (possibilité de mettre en avant la préférence nationale dans la rédaction des marchés) –, l’importance de reconduire ou d'étendre le TODE (dispositif sur les travailleurs occasionnels-demandeurs d'emploi) ou réduction des cotisations patronales sur tous les salariés agricoles (actuellement suivant les montants de salaire)…

Par contre, les horticulteurs et pépiniéristes relèvent plusieurs points supplémentaires qui les différencient des revendications générales : « En plus, nous avons le passeport phytosanitaire européen qui a évolué récemment. Maintenant, le système reporte totalement la responsabilité sur le producteur, qui doit savoir reconnaître les organismes de quarantaine et donc s’assurer lui-même que les végétaux vendus sont indemnes d’organismes de quarantaine (OQ) et d’organismes réglementés non de quarantaine (ORNQ). Ceci s’accompagne, bien sûr, de déclarations tous les ans des cultures en production, des passeports phytosanitaires sur les factures suivant les variétés (plus ou moins sensibles)… » liste le Cercle des horticulteurs d’Île-de-France.

Viennent aussi :
- la possibilité très réduite de faire des extension d’usages de produits phytosanitaires avec AMM (autorisation de mise sur le marché) pour d’autres filières car ce marché spécifique est très réduit et donc sans intérêt pour les firmes. Il n’est « pas pris en compte du fait que nous sommes des “cultures mineures” » ;
- les problèmes d’AMM des désherbants pour la pépinière, sujet le plus complexe actuellement ;
- la loi abeilles « totalement non tenable pour nos productions horticoles où il y a toujours une culture en fleur dans les lots vu la diversité des variétés »…

Et si les missions de l’horticulture ornementale en faveur de l’environnement sont entendables par les citoyens, il reste difficile d’assurer des prix à hauteur des besoins pour la survie des exploitations, confirment les producteurs.
À l’image de Marie-Laure Javoy-Rauline (Pépinières Javoy), certains espèrent un sursaut citoyen.

Premières mesures insuffisantes

À l’heure de la rédaction de ce texte, tout comme pour les agriculteurs manifestants, les horticulteurs qui ont donné leur avis jugent « positives, bien que insuffisantes pour le moment » les premières annonces du Premier ministre Gabriel Attal dans le sud de la France vendredi 26 janvier puis mardi 30 janvier lors de son discours de politique générale.

Dans l'expectative, le syndicat horticole Verdir espère « qu’elles dévoilent un début de chemin vers lequel doit se diriger l’administration, les mondes agricole et politique. Un chemin fait de dialogues, d’échanges et de respect mutuel ».

Sylvain Audemard, agriculteur et président de la chambre d’agriculture du Var, est plus tranché : « Pour l’heure, les annonces du Premier ministre Gabriel Attal sont insuffisantes pour les agriculteurs varois : maraîchers, éleveurs, arboriculteurs, viticulteurs, horticulteurs, oléiculteurs, pépiniéristes, apiculteurs, mimosistes, aquaculteurs… Les attentes, pressantes, sont encore nombreuses. Nous restons mobilisés. »

Les adhérents de Verdir (FNPHP) affichent leur soutien : « En solidarité avec l’ensemble de la profession, nous, producteurs de végétaux, soutenons et participons aux mobilisations des agriculteurs depuis le début de semaine partout en France. » (© Verdir)

Un soutien sans faills, une voix pas assez audible, encore de l’espoir

Malgré ses attentes de dialogue, Verdir apporte son soutien aux manifestants. Sur le réseau LinkedIn, on pouvait lire : « Les couleurs de Verdir (FNPHP) teintent l’engagement du monde agricole ! En solidarité avec l’ensemble de la profession, nous, producteurs de végétaux, soutenons et participons aux mobilisations des agriculteurs depuis le début de semaine partout en France. L’agriculture constitue aujourd’hui le socle de l’équilibre environnemental de notre pays et Verdir prend toute sa part dans sa conservation, sa protection et son développement. Nous sommes de ceux qui façonnent les paysages. De ceux qui créent des terrains fertiles pour la biodiversité en ville comme à la campagne. De ceux qui participent à rendre notre quotidien plus beau et notre monde plus viable. Pour autant notre voix reste inaudible et notre travail n’est pas rémunéré à sa juste valeur. »

Les adhérents du Cercle des horticulteurs d’Île-de-France et le Conseil horticole partagent et soutiennent les revendications. Au début, s’ils n’ont pas souhaité manifester, ils ont décidé d’alimenter la caisse des barrages à l’intention des agriculteurs. « Nous donnons 300 € par département de la région parisienne pour marquer notre solidarité. Nous pouvons aussi apporter une aide logistique, notamment pour les nuitées. »

Frédéric Naudet, président du conseil d’administration de l’Association française du sapin de Noël naturel (AFSNN), prenait position : « Les producteurs français de sapins de Noël soutiennent sans faille l’actuel mouvement et les revendications des agriculteurs de France. […] Face aux additions de règles, de normes et de contrôles, comment ne pas craindre qu’un fossé concurrentiel se creuse entre la France et nos États voisins dont les producteurs profitent de ces inégalités ? Ils tiennent à participer activement à la transition écologique mais resteront les fervents défenseurs de leur profession. Malgré leurs efforts, ils sont pourtant la cible de nombreuses campagnes de dénigrement de la part de groupes purement partisans et dont certains médias complaisants portent la voix. Ainsi ils tiennent à alerter les pouvoirs publics et demandent une simplification des réglementations. Attentifs aux prochaines annonces du gouvernement, ils appellent les membres de l’AFSNN à rejoindre cette mobilisation pacifique. »

Dans le Var, une délégation de la FDSEA et de Jeunes Agriculteurs a été reçue par le préfet. « Les problèmes des éleveurs, horticulteurs et viticulteurs ont été notamment débattus : simplification administrative, adaptation de la loi Egalim, sécheresse et mesures pour l’eau, cultures méditerranéennes… » a rapporté la préfecture.

Le président de la chambre d’agriculture départementale a confirmé et précisé : « Depuis plus de vingt ans, la situation des agriculteurs varois s’est dégradée. La détresse et les inquiétudes sont fortes. […]. Nous sommes prêts à mettre en œuvre les avancées obtenues. Nous sommes aux côtés et à l’écoute des représentants syndicaux pour proposer des mesures concrètes, et nous travaillons avec le préfet pour accélérer la remontée de l’ensemble des doléances du monde agricole varois au gouvernement. »

Sylvain Audemard n’oublie pas de « remercier chaleureusement les Français pour leur soutien et leur solidarité au monde agricole. Leurs messages sont précieux. Chaque jour, nous travaillons à construire un avenir plus solide pour notre agriculture locale et notre souveraineté alimentaire ».

Et de conclure quand même sur une note d’espoir : « Le métier d’agriculteur est un beau métier, une passion et une fierté. C’est maintenant qu’il faut agir pour que les agriculteurs d’aujourd’hui et de demain puissent vivre décemment de leur travail et renforcer durablement nos agricultures locales ».

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