“Coordonner service commercial et logistique grâce au Lean management”

Né au Japon, dans le secteur de l'automobile, le Lean management vise à réduire les temps de travail « non créateurs de valeur ». La coopérative horticole Fleuron d'Anjou (production et vente de fruits, légumes, fleurs et plantes), aux Ponts-de-Cé (49), s'est intéressée à cette méthode de gestion dans les années 2007 et 2008. « À l'époque, nous avions un problème d'organisation sur la plate-forme d'expédition des Ponts-de-Cé. Une dizaine de fois par saison, nous accusions des retards de livraison », précise Didier Bouget, directeur d'exploitation. Bien que ponctuel, le problème n'en était pas moins prégnant et finalement coûteux.

Pour le solutionner, Fleuron d'Anjou a sollicité le cabinet Altasys Conseil à Angers.

L'accompagnement qui s'en est suivi a démarré par une table ronde de toutes les parties concernées : les services commercial, technique, informatique mais également les producteurs, les responsables de la plate-forme ainsi que Didier Bouget et la direction générale de Fleuron. « Nous nous sommes rendu compte que, pour satisfaire nos clients, il arrivait que le service commercial accepte des commandes qui retardaient la clôture des vagues d'expéditions. » Un retard initial... impossible à rattraper et qui avait même tendance à augmenter au fil des étapes suivantes : prévenus tardivement, le(s) producteur(s) livrai(en)t également en retard (ils disposent de deux à trois heures pour réagir). L'agréage (*) était décalé d'autant « puisque chez nous il est réalisé par une équipe dédiée, puis par l'agréeur en titre, et par un producteur. Cette ultime vérification démarre quand tous les producteurs ont livré », explique Didier Bouget. Pendant ce temps, les préparateurs de commandes patientaient. Tout comme les transporteurs, « au risque, parfois, de les voir repartir à vide ». La chasse aux gaspillages, de temps et de gestes, notamment, est l'un des piliers du Lean management. « Nous avons donc coordonné le service commercial et la logistique. » Chez Fleuron d'Anjou, la première décision prise a été de respecter strictement les horaires de clôture des vagues d'expédition (en moyenne 90 commandes par vague, quelque 47 000 rolls de plantes expédiés par an). D'autres mesures ont suivi. « Nous avons, par exemple, revu l'organisation de la station et disposé les rolls en barillet (en étoile) plutôt qu'en linéaire. Cela évite aux préparateurs des allers-retours et réduit le nombre d'oublis. » Déjà amorcé, l'investissement dans des rolls CC s'est accéléré au point de supplanter totalement les chariots à quatre roues amovibles.

Parallèlement, pour vérifier l'efficacité des mesures prises, la coopérative a mis en place deux indicateurs.

L'un de productivité, mesurée en roll préparé par personne et par heure. L'autre de « satisfaction clients ». Résultat : comparé à 2008, « la productivité a doublé. Quant aux retards, ils sont devenus très rares. Les réclamations clients ont également fortement baissé », indique Didier Bouget. La démarche Lean a eu d'autres effets positifs. Mieux équipés, les préparateurs se blessent moins souvent. « Il y a moins d'accrochages, moins de blessures aux chevilles ou aux doigts. » Une réalité confirmée par l'évolution du taux d'accidents bénins qui enregistre une baisse de 75 %. Des économies ont également été réalisées sur les heures supplémentaires, celles de nuit et sur les primes de panier, à hauteur de 7 % de la masse salariale « plate-forme ». « Il y a quelques années, en haute saison », précise le directeur d'exploitation, « nous finissions presque chaque soir à 23 heures, voire minuit. Cette année, c'est arrivé une seule fois. Les autres jours, nous avons réussi à finir à 19 heures, 19 h 30 au plus tard. » L'autre acquis de la démarche concerne le transport des marchandises : « Nous avons retrouvé de la rigueur et avons été en mesure d'apporter des garanties aux transporteurs. » Ce faisant, Fleuron d'Anjou est sortie d'une situation relationnelle qui se tendait. Au final, la coopérative a repris la main, relancé un appel d'offres et pu négocier les prix. Fleuron d'Anjou a maintenu sa collaboration avec le cabinet Altasys Conseil pendant deux ans. « La démarche Lean est exigeante. Elle donne des résultats de manière progressive. Dans notre cas, la première année, ils n'ont pas été aussi importants que nous l'espérions », insiste Didier Bouget. « Mais il faut persévérer et maintenir l'exigence, quotidiennement. »

Anne Mabire

(*) Terme de pratique commerciale désignant le fait d'examiner la marchandise pour l'achat en commande.