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“Tolérance zéro pour la chenille processionnaire du pin”

« Nous souhaitons désormais mettre en oeuvre une gestion différenciée de la processionnaire », a souligné Jean-Marie Rogel, chef du service gestion du paysage à la direction des espaces verts de Lyon.PHOTO : VILLE DE LYON

Chef du service gestion du paysage à la direction des espaces verts de Lyon, Jean-Marie Rogel et son équipe ont développé une stratégie de lutte impitoyable face à la progression de ce fléau...

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« La présence croissante des processionnaires du pin dans les villes constitue une préoccupation de premier ordre pour les gestionnaires des espaces verts et la région lyonnaise n'est pas épargnée », a souligné Jean-Marie Rogel, chef du service gestion du paysage à la direction des espaces verts de Lyon, lors d'une journée technique organisée par Plante&Cité et consacrée à ce thème, au mois de juin dernier. En effet, depuis une vingtaine d'années, on constate une progression inexorable de ces chenilles processionnaires dans les zones urbaines et périurbaines. Leur aire de répartition a nettement progressé depuis la zone sud vers la moitié nord de la France, et les phénomènes cycliques de baisse de population, auparavant observés en milieu forestier, tendent à s'estomper.

La problématique de la processionnaire va au-delà d'une question de gestion des personnes allergiques. Tout le monde réagit au contact de ces insectes dont les soies s'accrochent sur la peau et les muqueuses en libérant des protéines toxiques et urticantes. Il s'agit d'un véritable problème de santé publique et d'un danger, non seulement pour les hommes, mais aussi pour les animaux domestiques. « Face à ce constat, la ville de Lyon a développé une stratégie de lutte basée sur un niveau de tolérance zéro. Car les pins représentent en outre presque 10 % du patrimoine arboré avec une présence parfois importante dans des sites particulièrement fréquentés par les Lyonnais, comme le parc de la Tête d'or. »

Depuis 2008, la dynamique des populations est suivie chaque année par un système de capture et de comptage sur différentes placettes situées dans des zones stratégiques. Sur 4 584 pins en gestion, 4 552 sont concernés par la lutte. Trois méthodes complémentaires sont utilisées. La première consiste à traiter au BTK (Bacillus thuringiensis Kurstak) en pulvérisation sur les zones de type boisement, peu facilement accessibles. En 2012, 2 367 pins ont été traités sur la rive droite du Rhône, avec un taux de réussite de 93 % (seulement 170 arbres infestés par la suite), 900 sur la rive gauche avec un taux de réussite de 97,3 %, 807 sur le parc de la Tête d'or (88,5 % de taux de réussite). Seconde technique, l'échenillage, en période hivernale, pour éliminer tous les nids facilement accessibles, soit 394 arbres en 2012. Les arboristes grimpeurs chargés de ce travail doivent être équipés d'une protection complète pour éviter toute contamination. Les nids sont ensuite détruits par brûlage en milieu confiné pour éviter la propagation des poils dans l'atmosphère. Enfin, la ville recourt au piégeage de masse des papillons adultes (pièges à phéromones). Toutes ces opérations sont réalisées par des prestataires externes, via des appels d'offres. Cette démarche de lutte systématique s'est avérée efficace. Une baisse importante des populations a été constatée entre 2009 et 2012, divisée par trois en quatre ans sur le parc de la Tête d'or. Cependant, son coût élevé, près de 95 000 euros pour l'année 2012, a conduit le service à faire évoluer la stratégie depuis 2013.

Dans le contexte économique actuel, la direction des espaces verts et la direction de l'écologie urbaine de Lyon réfléchissent à une évolution de la démarche. Cette lutte pénalise lourdement le budget au détriment de la gestion globale et sécuritaire du patrimoine arboré. « Nous souhaitons mettre en oeuvre une gestion différenciée. Nous étudions la possibilité de supprimer les actions curatives comme l'échenillage dans certains secteurs moins fréquentés, en y associant une campagne de communication ciblée visant à informer les promeneurs sur les risques en cas de contamination et les bons réflexes à avoir pour les limiter », a poursuivi Jean-Marie Rogel. En matière de lutte complémentaire, la direction des espaces verts travaille sur plusieurs pistes. « Une première consiste à développer la confusion sexuelle des papillons adultes en installant des pièges à phéromones spécifiques (systèmes sans capture). Cette approche fait l'objet d'une expérimentation sur un site. La seconde vise à installer des nichoirs pour attirer les mésanges réputées friandes des larves à certains stades. Une autre piste est de favoriser la présence d'autres auxiliaires prédateurs comme le calosome sycophante, grand coléoptère ou le syrphe Xanthandrus comtus, dont les larves se nourrissent toutes deux de la processionnaire. Enfin, nous prévoyons de remplacer au fur et à mesure des opérations de renouvellement les pins par d'autres essences. »

Yaël Haddad

Parmi les méthodes de lutte complémentaires mises en place, la confusion sexuelle des papillons adultes se fait en installant des pièges à phéromones spécifiques.

PHOTO : YAËL HADDAD

Aujourd'hui, la ville de Lyon recourt au piégeage de masse des papillons adultes.

PHOTO : YAËL HADDAD

L'échenillage, en période hivernale, permet d'éliminer les nids facilement accessibles. Les arboristes grimpeurs chargés de ce travail doivent être équipés d'une protection complète.

PHOTO : VILLE DE LYON

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