" Gérer les eaux pluviales via les toitures végétalisées "
Le Prieuré Végétal i.D., entreprise de 40 salariés du Loir-et-Cher, a inventé Hydroventiv®, une solution connectée qui stocke la pluie et n'en relargue qu'une partie à débit contrôlé et différé, en évitant de saturer le réseau. Un système de capteurs intégrés permet d'en suivre les performances à distance.
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Spécialiste des toitures végétalisées depuis les années 1990, Le Prieuré Végétal i.D. n'en est pas à sa première innovation. Installée à Moisy (41), cette entreprise dirigée par Raphaël Lamé mise sur la recherche et le développement. Sur les quarante salariés, trois sont affectés à ce service. En 2005, la société a inventé le bac végétalisé Hydropack®, le premier bac pré-cultivé modulaire, composé de quatre couches, à poser directement sur le toit, sans modifier l'étanchéité, comme l'explique Jean-Christophe Grimard, le responsable du service R & D. « Nos solutions sont toutes composées des quatre couches : végétaux, substrat, filtre et drainage. L'Hydropack® est une conception tout en un. Il s'agit d'un bac pré-cultivé de sédums seuls ou associés à des plantes aromatiques, graminées et vivaces, qui se clipsent les uns aux autres sur une toiture et rassemblent tous les composants du système de végétalisation multicouches avec, en plus, des alvéoles de réserve d'eau situées sous le substrat. » Aujourd'hui, il existe plusieurs conceptions de bacs pour toitures végétalisées sur le marché. L'activité de l'entreprise s'est industrialisée, de l'étude à la pose, en passant par la production, la logistique, et depuis deux ans, l'entretien des toitures.
Des solutions alternatives. Le Prieuré Végétal i.D. est devenu un spécialiste de la gestion des eaux pluviales en ville. La réglementation impose des pratiques de plus en plus contraignantes en la matière. L'augmentation croissante de l'urbanisation et de l'imperméabilisation des sols perturbe le cycle de l'eau. « Généralement dans la plupart des villes, les réseaux des eaux usées et pluviales se rejoignent avant la station d'épuration (step). Lorsqu'arrive un orage, le débit et le volume d'eau sont tellement forts que les réseaux s'engorgent et la station d'épuration ne peut pas tout absorber. Lors de ces évènements pluvieux intenses, la réglementation autorise les villes à court-circuiter la station d'épuration et à larguer l'eau directement au déversoir, bien souvent dans le fleuve, une vingtaine de fois par an. Néanmoins, les Agences de l'eau préconisent de plus en plus la limitation de ces relargages directs. Les collectivités cherchent donc des solutions alternatives "au tout tuyau" pour mieux gérer leurs eaux pluviales en amont », indique Jean-Christophe Grimard.
Pour répondre à ce besoin, Le Prieuré Végétal i.D. a conçu Hydroventiv®, un sous-bac de stockage-régulation, qui se positionne sous le bac Hydropack®, combiné à un système de monitoring communicant. Dans le bac Hydropack®, le substrat et les alvéoles peuvent retenir jusqu'à 45 l d'eau par mètre carré. Avec le sous-bac, cette capacité est doublée. Les sous-bacs sont reliés à un régulateur qui évacue l'eau stockée vers le réseau selon le microdébit fixé par la collectivité, limitant ainsi la quantité d'eau rejetée. D'autre part, deux mèches de capillarité permettent de remonter l'eau stockée vers les plantes, favorisant l'évaporation. La solution Hydroventiv® permet d'irriguer la végétation pour qu'elle supporte mieux les périodes de sécheresse, particulièrement en zone méridionale, où aujourd'hui, l'arrosage est systématiquement installé en toiture. Testées à Lyon (69) et à Paris (75) depuis deux ans avec l'Insa (Institut national des sciences appliquées) de Lyon, le Grand Lyon et mairie de Paris, sur les sites expérimentaux de l'entreprise, les toitures végétalisées n'ont jamais débordé, même lors des fortes pluies du printemps 2016.
Hydroventiv® n'est pas systématiquement végétalisé. Dans certains cas, les mêmes sous-bacs sont utilisés pour recevoir des platelages en bois qui constituent des allées de cheminement. La toiture est alors accessible et on peut combiner des espaces végétalisés avec des chemins d'accès, ou des allées techniques en bois qui participent aussi à recueillir la pluie. Le prix de la solution complète (avec végétaux et système de monitoring), fournie posée, évolue entre 110 et 130 euros par mètre carré, avec un entretien offert la première année, puis entre 3 et 5 euros par mètre carré et par an de maintenance.
Un pilotage intelligent. Pour améliorer encore sa solution, l'entreprise loir-et-chérienne a ajouté un procédé utilisant des capteurs ultrason autonomes et communicants, le système Cactus. Répartis dans quelques bacs, ces capteurs mesurent toutes les heures le niveau d'eau stockée et transmettent ces données à un serveur distant. « Sans se déplacer, le pilotage permet de savoir en temps réel l'état du système et ses performances hydriques, le volume stocké et le débit de fuite. Il permet également de suivre la vidange, et nous renseigne sur d'éventuels incidents. C'est un outil de diagnostic et de maintenance très utile », ajoute Jean-Christophe Grimard.
Aujourd'hui, les données sont unidirectionnelles : les capteurs les envoient vers le serveur, essentiellement pour du suivi et de la maintenance. Mais depuis le mois d'avril, Le Prieuré Végétal i.D. met au point un envoi bidirectionnel avec transmission de consignes qui va être installé sur le site démonstrateur Smartseille sur un immeuble du nouvel éco-quartier Euromed, à Marseille (13), pour piloter l'irrigation à distance.
Cette fois-ci, des consignes d'ouverture et de fermeture sont envoyées du serveur vers des électrovannes, permettant de piloter la toiture à distance (ouverture pour vidange en eau ou recharge par subirrigation). Le système devient « intelligent », en prenant en compte les données météorologiques. Quand de fortes pluies sont annoncées, les bacs des toitures végétalisées se vident pour pouvoir absorber les futures précipitations. Inversement lorsque le procédé détecte que le niveau d'eau se situe à zéro depuis plusieurs jours, il déclenche la subirrigation. Selon Le Prieuré Végétal i.D., dans les régions méditerranéennes, cette solution pourra s'accompagner d'une économie d'eau substantielle, voire dans certains cas, de la possibilité de supprimer totalement le dispositif d'irrigation, tout en assurant la préservation du couvert végétal. Cette nouvelle innovation devrait être commercialisée en 2018.
Aude Richard
Démarche d'automatisation et industrialisation de la production. Les végétaux sont produits dans des bacs ou sur des tapis pour être plus facilement manipulés, transportés et installés. PHOTO : AUDE RICHARD
Depuis avril, l'entreprise met au point un envoi bidirectionnel avec transmission de consignes, qui va être installé sur le site démonstrateur Smartseille sur un immeuble du nouvel éco-quartier Euromed, à Marseille (13), pour piloter l'irrigation à distance. PHOTO : LE PRIEURÉ
Un sous-bac, positionné sous le bac végétalisé, permet de recueillir et de gérer 50 l/m2 supplémentaires pour profiter davantage aux plantes, et ainsi ne pas engorger les réseaux d'eau pluviale. PHOTO : AUDE RICHARD
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