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" Diversifier sa production pour s'adap ter au marché "

Christophe Chargé s'adapte au marché. Mais il recentre également ses techniques de production en conséquence, en investissant par exemple dans un système de guidage par GPS (RTK Trimble).

Christophe et Carole Chargé, pépiniéristes à Louresse-Rochemenier (49), font évoluer leur gamme de li gneux en fonction des mutations du marché.Certains choix augmentent la charge de travail et l'optimisation des techniques de production est plus que jamais nécessaire.

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Situées au coeur de l'Anjou, les pépinières Chargé sont spécialisées historiquement dans l'élevage de fruitiers et, depuis 1995, celui d'arbres d'ornement. En 2013, Christophe Chargé, son dirigeant, a repris l'activité d'Alain Vauvert, et plus précisément son matériel végétal : quelque 6 000 palmettes verrier qu'il replante au fil des années sur ses propres terrains. Sa gamme s'est ainsi enrichie d'une nouvelle forme fruitière, déclinée en 23 variétés de pommiers et 20 de poiriers, les essences à noyaux ne supportant pas la taille. Le pépiniériste a élargi cette gamme en y ajoutant d'autres formes de fruitiers à petit développement : palmettes obliques, cordons simples et doubles. « Mon objectif n'est pas d'agrandir l'exploitation, mais de produire mieux, et d'améliorer nos techniques. Le marché des gros sujets d'ornement s'est effondré, du coup nous nous sommes diversifiés pour nous adapter. Il faut toutefoismaintenir un volume suffisant pour continuer d'investir. » La clientèle a également évolué. En contrepartie de cette diversité, l'arrachage prend désormais 5 mois quand il n'en nécessitait que 3 auparavant : « Davantage de petites commandes pour davantage de petits clients, c'est plus sécurisant mais moins rentable ! »

> Le choix des essences. « Nous cultivons uniquement ce qui pousse bien dans nos sols. Par exemple, nous n'avons pas de plantes acidophiles comme les chênes. » Comme les terres autour de Louresse-Rochemenier sont hétérogènes et que la surface totale est un peu juste pour les rotations, le pépiniériste diversifie les essences. La gamme se compose aujourd'hui de 70 % (en volume) de fruitiers et de 30 % de ligneux d'ornement. « Il y a 10 ans, la répartition était de 50-50 avec d'importants vo-lumes à l'export de plantes d'ornement. En 2008, ce marché s'est effondré. » Les volumes ont diminué, la gamme ornementale aussi s'est réduite, la pépinière abandonnant certaines essences vendues à bas prix par les producteurs étrangers (tilleuls, platanes...).

L'entreprise s'est également adaptée à l'évolution de la clientèle. Il y a 20 ans, elle se composait à 50 % d'arboriculteurs, car elle était à son origine spécialisée dans la culture de pommiers à cidre et à couteaux, en plus de la production de peupliers. « Mais le marché de la pomme à couteaux a progressivement diminué avec la concentration des exploitations qui sont passées à plus de 100 ha avec des 'variétés club' dont nous n'avons pas les licences. » Il atteint aujourd'hui 10 % du chiffre d'affaires. Dans les années 1980, le père de Christophe Chargé a orienté l'entreprise vers la pépinière, en signant à l'époque des contrats de culture avec des sociétés françaises de renom. Actuellement, aucun des clients ne représente plus de 5 % du chiffre d'affaires. La pépinière ne propose que de la racine nue, ce qui limite la période de vente (de fin octobre à début mars) et donc la clientèle.

> Les petits jardins et l'engouement des consommateurs pour les espèces fruitières ouvrent des débouchés à l'exploitation. « La palmette offre à la fois un aspect esthétique et occupe un petit espace tout en donnant de nombreux fruits », souligne Christophe Chargé. Toutefois, cette forme représente cinq années de travail et exige de nombreuses heures de travail en culture. Outre la taille, il faut retirer les fleurs pour éviter que les fruits ne ralentissent la croissance. « Mais nous avons tellement de variétés qu'il n'est pas possible de défleurer chimiquement, l'opération est donc manuelle. » Le problème ne se pose pas avec les scions, les tiges et demi-tiges qui sont rabattus courts et vendus avant l'apparition des fruits. Ce volume de travail explique la différence de prix entre un scion de 2 ans et la palmette verrier dont le prix est multiplié par 8 à 10.

Parmi les fruitiers formés, la palmette verrier est la plus demandée. « À l'export, il faudrait plutôt du U double », précise le pépiniériste. « La forme verrier correspond à 2 U l'un dans l'autre, c'est un produit typiquement français. » Le producteur demeure prudent sur l'évolution du marché : « Les Italiens, qui achetaient en France leurs fruitiers formés, commencent à les former eux-mêmes, d'où un risque de concurrence dans les années à venir. Et de plus en plus de professionnels se mettent à proposer des formés. » Selon ses estimations, une vingtaine de pépiniéristes produisaient du fruitier formé il y a 5 - 6 ans, et ce nombre a augmenté depuis.

> Christophe Chargé reste à l'écoute des évolutions techniques. Grâce aux nouvelles techniques de guidage de la greffe (accolage), l'exploitation peut proposer des arbres plus droits au niveau du point de greffe. « L'utilisation d'Ocuclips ou de cornières en aluminiumpermet d'assurer une rectitude au départ de la greffe afin d'éliminer le coude du point de greffe. Le produit obtenu est idéal pour le rempotage et la transplantation. »

Au lieu d'un greffage réalisé en plein champ en août sur un porte-greffe rabattu au sol, l'opération s'effectue sur table en janvier - février sous abri. Cette technique demande moins de savoir-faire (pas d'écusson ou chip-budding) et permet de gagner une année de végétation pour une tige, car le sujet pousse de près d'un mètre dès la première année. Il faut toutefois planter le fruitier greffé assez tard car il est sensible au gel.

Le pépiniériste a acheté en 2017 un système d'autoguidage par satellite RTK Trimble (société Euratlan) pour ses tracteurs. L'achat des 2 volants électriques, d'une valise de tracteur, des antennes et du paramétrage représente un investissement de 25 000 euros. Le tracteur suit une ligne et obéit à une consigne de plantation (tous les 1,80 m), de binage interrang et de travail intercep.

La pépinière possède un Phytobac pour traiter les eaux de lavage des tracteurs et des pulvérisateurs : cet investissement a été réalisé dans le cadre de l'adhésion à la certification Plante bleue. Côté phytosanitaire, les principaux traitements portent sur le désherbage, l'oïdium certains étés sur ligneux d'ornement, pucerons et cochenilles sur fruitiers.

Christophe Chargé a fait installer en septembre 2016 une serre plastique de 1 000 m2. Il y réalise différents essais, comme le démarrage des jeunes plants à croissance lente (Lagerstroemia, Cercis, amélanchier...) sous abriavant la plantation, ou en-core différents greffages. Cette structure permet également de centraliser la ven-te au détail le samedi matin et elle sert de jauge l'hiver. Le producteur prévoit par ailleurs d'installer du photovoltaïque sur le bâtiment de stockage.

Valérie Vidril

Le producteur commercialise différentes formes de fruitiers : scion, quenouille, demi-tige, tige, cordon un bras ou 2 bras,palmettes. Ici une palmette verrier de 5 ans.

Outre des investissements réguliers, Christophe Chargé mène ses propres expérimentations de comportement, de greffage... Ici sous une serre installée en 2016.

L'objectif du pépiniériste n'est pas d'agrandir l'entreprise mais d'optimiser la production, en témoigne cette planteuse sur 2 rangs achetéel'an dernier.

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