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" Miser sur la production et la largeur de gamme "

« Je crois encore au métier et à la production », souligne Sébastien Ramette. C'est ce qui pousse le pépiniériste à investir, avec par exemple l'installation de 2 000 m2 de serres pour le point de vente.

Installé à Marolles (14), près de Lisieux, Sébastien Ramette croit fortement dans l'avenir de la pépinière française. Il investit en conséquence tout en diversifiant sa production et en développant la vente au détail de l'entreprise familiale.

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D'année en année, les pépinières Ramette, basées à Marolles (14), se sont développées. Hormis en 2016 qui a vu une baisse de 5 % du chiffre d'affaires, ce dernier a augmenté de 30 à 40 % en cinq ans. Cette réussite est le prix d'une évolution constante qui a amené l'entreprise familiale, fondée en 1976, à se transformer en une holding (Ckoya) rassemblant des entreprises de paysage, de services et de production. Pour son gérant, Sébastien Ramette, la stratégie actuelle consiste à valoriser la force de l'entreprise - la production - et à proposer à ses clients une large diversité végétale.

L'entreprise vend uniquement des végétaux d'extérieur : arbres, arbustes, vivaces et rosiers, accompagnés d'une offre de divers terreaux, paillages organiques et minéraux, toile tissée et tuteurs. La part des ventes aux collectivités est accessoire, d'autant qu'elle diminue, « les villes plantant de moins en moins ». Sébastien Ramette mise sur la vente au détail, avec l'aménagement en 2017 de 2 000 m2 de serres pour le point de vente. Ce dernier accueille aussi bien les particuliers que les paysagistes dans un périmètre de 100 kilomètres à la ronde, deux clientèles qui augmentent. « Nos ventes sont destinées à 60-70 % aux propriétaires de maisons secondaires. » La pépinière, située au coeur du Pays d'Auge, près de Lisieux en Normandie et non loin du triangle d'or (Honfleur, Deauville, Pont-l'Évêque), bénéficie en effet d'une clientèle relativement aisée. Avec un panier moyen d'environ 190 euros, ces propriétaires de grandes propriétés ou de haras achètent d'autant plus facilement des gros sujets qu'ils veulent des résultats immédiats. Le bouche à oreille aidant, les ventes s'étendent à l'échelle du territoire voire hors frontières (Italie, Suisse, Royaume-Uni...).

Si Sébastien Ramette souhaite développer la vente au détail, ce n'est pas pour autant en développant le modèle de la jardinerie. Le groupe a vendu en 2015 les deux qu'il possédait. « Ça représentait trop de travail et trop de personnel. C'est compliqué d'être à la fois producteur et distributeur... J'ai décidé de me concentrer sur la production. »

Le chiffre d'affaires est progressivement lissé sur l'année grâce aux ventes en conteneurs qui augmentent. « Les clients plantent beaucoup moins l'hiver, et nous vendons très bien en été. » Les gros sujets et les fruitiers continuent d'être produits en pleine terre, « mais de plus en plus, nous rempotons la dernière année pour vendre en conteneur. » L'offre en pot et la largeur de gamme permettent ainsi à la pépinière d'obtenir un chiffre d'affaires de juillet équivalant à celui de janvier. « Nous proposons de nombreuses références, tant en espèces et variétés qu'en tailles. C'est une force, car nous ne mettons pas tous nos oeufs dans le même panier. Mais c'est aussi une faiblesse : la gestion est compliquée et l'entreprise n'a pas de spécialisation. »

« Il est difficile de prévoir le marché dans 5-10 ans, surtout en culture de pleine terre. Mon choix est de mettre tout en production, en petites séries, pour minimiser les risques. » La gamme augmente ainsi au fur et à mesure afin de répondre à la demande. « Nous produisons aujourd'hui des vivaces (du 4 litres au 10 litres), ce que nous ne faisions pas il y a 10 ans. Nous proposons aussi de plus en plus de végétaux sensibles au froid (cordyline...). Les classiques arbustes caducs - forsythias, weigélias... - sont en perte de vitesse. Pour les balcons-terrasses, ce sont surtout des persistants qui sont demandés. »

Sébastien Ramette croit en l'avenir du végétal et investit en conséquence. « Je suis convaincu que, dans la prochaine décennie, il manquera de plantes. Partout en Europe, des pépinières disparaissent. Et la valeur du foncier et du stock ne permet pas à un jeune de les reprendre. Même si la consommation végétale baisse, nous allons finalement manquer de produits. D'autant plus que la réglementation finira, j'en suis certain, par favoriser le végétal dans la construction (alors que le jardin -équipement et végétal - représente aujourd'hui à peine 10 % d'un budget). C'est pourquoi je me donne les moyens d'investir. »

Le pépiniériste regrette que les pouvoirs publics ne soutiennent pas la filière. « Il faudrait que tous les professionnels puissent investir, car nous sommes sous-équipés en France par rapport à l'étranger ! » Entre les coûts de production et les retours sur investissement trop longs qui freinent les banques, « il vaut mieux être négociant que producteur ! », conçoit-il. Dans sa pépinière, le négoce représente environ 20 % du chiffre d'affaires de l'entreprise et reste stable. « Cette part est nécessaire pour pouvoir fournir l'intégralité d'une commande pour les paysagistes ou certains gros clients. Nous achetons auprès de confrères français et étrangers des plantes méditerranéennes (olivier, laurier-rose), fruitiers « palmettes », camélias, rhododendrons, vivaces en godets, très gros bambous, topiaires, bonzaïs... »

Les investissements ont permis aux pépinières Ramette de s'agrandir et d'embaucher, avec dernièrement 4 000 m2 de serres de production fin 2016 et 2 000 m2 pour le point de vente en 2017. Ils accompagnent également l'entreprise, en cours de certification Plante bleue, dans sa démarche environnementale : palpeurs en 2016, pailleuse pour les conteneurs il y a 5-6ans ; installation d'une réserve d'eau l'hiver 2016-2017. Sébastien Ramette vise le « zéro phyto » d'ici 5 ans. « Notre objectif est également de mécaniser un maximum pour améliorer le confort de travail et la productivité. » Cette évolution passe par l'optimisation de la manutention des pots, avec l'achat de chariots transporteurs, et la réorganisation des plateformes... Les prochains investissements 2017-2018 porteront sur des bâtiments d'expédition et de rempotage.

Valérie Vidril

À l'automne 2016, 4 000 m2 de serres de production ont été installés, dont ce bitunnel de deux fois 10m de large sur 100 m de long, double paroi en toiture, simple paroi latérale.

La serre d'hivernage (4 500 m2) est munie de double paroi en toiture, simples parois latérales et filet anti-vent. Elle abrite une partie des plantes persistantes ou sensibles au froid.

Les gros sujets et fruitiers sont produits sur les 50 ha de pleine terre.

Les investissements ont permis à la pépinière de s'agrandir. Ils s'orientent désormais vers l'amélioration du confort de travail et de la productivité, ainsi qu'une production plus durable. Ici, les bassins de décantation et de récupération installés l'hiver 2016-2017.

La clientèle de la pépinière apprécie les gros sujets pour un effet immédiat, comme ce Choisya de 15 litres issu de pleine terre.

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