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“Transformer les contraintes en opportunités”

Christophe Cadet, chef de culture à Fleurs des 7 îles, dans le Morbihan (56), présente avec passion une entreprise qui maintient le cap de ses engagements environnementaux, tout en s'ouvrant à la vente au détail dans un contexte de marché tendu.

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Fleurs des 7 îles est dissimulée dans un petit hameau du Morbihan, à Plougoumelen, à quelques kilomètres de Vannes. L'entreprise produit une large gamme de végétaux : plus de 1 000 espèces cultivées et, chaque année, 10 à 15 nouvelles variétés peu connues. Les objectifs de son dirigeant, Loïc Cheval : rester une entreprise économiquement viable, maintenir l'emploi et la motivation de son équipe, renforcer les liens entre producteurs et consommateurs, tout en favorisant la biodiversité et les techniques les plus avancées dans le domaine du respect de l'environnement. Pour garder le cap, l'entreprise « transforme les contraintes en opportunités... », souligne Christophe Cadet, chef de culture.

« Fin 2003, Fleurs des 7 îles a dû déménager pour poursuivre son développement », poursuit-il. En effet, le terrain sur lequel Loïc Cheval s'est installé il y a vingt-cinq ans, situé en bordure du golfe du Morbihan, à proximité du lieu-dit Les 7 îles, à Baden, n'offre plus de possibilité d'agrandissement. De plus, la loi littoral lui retire 2 hectares d'exploitation : en 2000, les terrains jusqu'alors classés agricoles ont été inscrits en NDS (espaces naturels remarquables). Le chef d'entreprise profite de ce déménagement pour apporter des changements dans l'entreprise, notamment en termes d'environnement. « En nous implantant à Plougoumelen, nous avons optimisé la gestion de l'eau et des déchets végétaux, et développé la protection intégrée des cultures sous serres », rapporte Christophe Cadet. Afin d'intégrer les serres dans le paysage, l'entreprise reconstitue également plus de 300 m de talus plantés. « Nous récupérons et recyclons l'ensemble de nos eaux d'arrosage. » Les pots sont posés au sol sur une nappe d'irrigation recouvrant une bâche imperméable. Une pente de 1,5 % dans la longueur et vers l'allée assure l'écoulement de l'eau vers une lagune de filtration plantée de Phragmites. « Nous avons emprunté l'idée à la station d'épuration de Roscoff ! » Le filtre biologique planté de roseaux recycle l'eau d'irrigation, ainsi que les eaux sanitaires de l'exploitation. Toutes les eaux de toiture sont collectées, et dirigées directement vers l'étang de retenue. L'eau du bassin est pompée dans une citerne placée dans l'une des serres : « Cela permet d'avoir une eau d'arrosage à la température de l'abri. » Un forage permet de sécuriser l'approvisionnement.

L'entreprise a fait de la coccinelle sa « mascotte », pour communiquer auprès du public sur les méthodes de lutte intégrée utilisées dans les serres depuis près de dix ans, des méthodes qui « demandent un suivi rigoureux, une parfaite connaissance du végétal, une observation attentive du producteur naturaliste », selon le chef d'entreprise. « Nous avons développé un savoir-faire spécifique dans l'élevage des insectes auxiliaires, qui constitue l'un des atouts de l'exploitation. Notre responsable de la protection phytosanitaire, Jean-François Le Douarin, s'occupe de cet élevage sur des plantes relais, qui sont disséminées par la suite dans les serres. » L'équipe technique de Symbiose protection biologique, entreprise basée à Guérande, distributrice de la firme anglaise de production d'insectes auxiliaires et pollinisateurs Biological Crop Protection, assure le suivi (tous les quinze jours en saison) et l'apport des auxiliaires. Fleurs des 7 îles pratique le tri sélectif. Cartons, plastiques (pots, barquettes) et ferrailles triés sont acheminés à la déchetterie de Vannes. Les déchets végétaux et terreaux usagés sont compostés et réutilisés par des agriculteurs locaux comme amendement. L'entreprise a longtemps cherché avant de trouver auprès de qui se débarrasser de ses couvertures de serre. En 2011, elle a finalement fait récupérer ses films usagés par Général recyclage, à Landemont (49). « Nous sommes toujours à la recherche d'un recyclage pour tous nos autres plastiques, bâches de sol, pots, barquettes, godets... », précise Loïc Cheval. L'entreprise a diminué l'usage de la fertirrigation au profit d'un engrais 6-12 mois à libération lente. « Nos cycles de culture sont certes plus courts, mais l'engrais profite ensuite aux clients », déclare Christophe Cadet. « La libération très progressive évite que l'engrais soit lessivé par les arrosages ou les pluies intempestives. » La gamme de plantes produites à Fleurs des 7 îles ne nécessite que peu de chauffage : les vivaces sont cultivées sous serre ou tunnel plastique simple paroi, avec juste un chauffage hors-gel. Une serre d'un hectare double paroi avec chauffage au sol et toile d'ombrage (eau à 30 °C, chaudière gaz) sert à la production de plantes méditerranéennes et à massif, à la multiplication et à la vente au détail.

L'entreprise est certifiée MPS-A pour ses bonnes pratiques environnementales.

Depuis trois ans, Fleurs des 7 îles s'est tournée vers la vente directe, une manière de sécuriser l'activité dans un contexte de marché de gros un peu tendu. Elle a intégré en 1996 le groupement de producteurs Vivaplantes, qui vend aux jardineries dans toute la France. « Le système coopératif permet des complémentarités de gammes entre producteurs, des échanges techniques et une adaptation aux demandes des marchés professionnels », précise Loïc Cheval. L'entreprise apporte ainsi des plantes vivaces (surtout des godets) et un peu de plantes méditerranéennes, d'autres producteurs du Grand Ouest, des aromatiques, des petits fruits, des géraniums... Si la vente directe permet « d'assurer le coup », elle « donne la possibilité de renouer avec nos valeurs – transmettre la passion du végétal, de la multiplication des plantes et de la biodiversité – en développant la relation directe producteur-utilisateur », affirme Loïc Cheval. « Cela commence à fonctionner correctement », assure Christophe Cadet. Une partie de la grande serre est ainsi dévolue à l'accueil du client qui se promène au milieu des pots à même le sol ou exposés sur des présentoirs. L'entreprise a embauché une personne pour la vente au détail ; une personne de la production vient en appui si nécessaire. Le visiteur peut choisir ses plantes, composer ses jardinières : une table de rempotage est mise à sa disposition, de même que des poteries. « Aujourd'hui, nous sommes fiers de pouvoir témoigner de nos pratiques, que nous aimerions voir se développer », conclut le dirigeant.

Valérie Vidril

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