Dossier gestion de l'eau Recycler pour sécuriser l’approvisionnement en eau

Marie-Laure Javoy-Rauline, cogérante de Javoy Plantes, et Arnaud Crosnier, vice-président de Valhor, ont présenté des solutions concrètes de gestion de l'eau lors d’une journée organisée par l'interprofession le 11 juin 2025 près d'Orléans.
Marie-Laure Javoy-Rauline, cogérante de Javoy Plantes, et Arnaud Crosnier, vice-président de Valhor, ont présenté des solutions concrètes de gestion de l'eau lors d’une journée organisée par l'interprofession le 11 juin 2025 près d'Orléans. ©F. Mélix

Il y a plus de vingt ans, Javoy Plantes a été la première pépinière en France équipée d’un dispositif de récupération et de réutilisation de l’eau. Le but : économiser la ressource.

A Saint-Cyr-en-Val (45), Javoy Plantes est une pépinière qui fait figure de pionnière. Un dispositif de gestion de l’eau en circuit fermé, mis en place en 2003, a permis de récupérer 30 % des eaux utilisées, limitant les prélèvements sur les ressources naturelles.

Pas moins de 780 000 € ont été investis dans l’objectif de créer des aires de culture étanches orientées vers des zones de drainage centralisé et de mettre en place des toitures et surfaces bâchées connectées à un réseau de récupération gravitaire. Deux bassins de 8 000 m³ au total stockent l’eau avant de la redistribuer dans le circuit d’irrigation grâce à un système de filtration et de pompage.

Toute l'eau (de pluie ou d'arrosage) qui tombe sur l'aire de culture est récupérée par gravité dans les bassins – de 8 000 m³ au total – et renvoyée dans le circuit d'irrigation. (© F. Mélix)

Pouzzolane et bassins

Concrètement, les aires de culture ont été décaissées sur 20 cm, des drains sont installés au cœur de la couche de pouzzolane, elle-même recouverte par une toile hors-sol. Toute l’eau (de pluie ou d’arrosage) qui tombe sur l’aire de culture est ainsi récupérée par gravité dans les bassins et renvoyée dans le circuit d’irrigation.

« En fin de saison d’arrosage, en réutilisant toujours la même eau, cette dernière se charge en calcaire et peut boucher des sprinklers », précise Marie-Laure Javoy-Rauline, cogérante avec son frère, Benoît, de Javoy Plantes depuis 2010. « Tout le matériel est donc vérifié quotidiennement. L’hiver, le système entier est démonté et nettoyé. » Si les bassins sont à sec, comme en 2023, l’eau est pompée via deux forages. « Avec un plus gros bassin, nous serions totalement autonomes, mais étant dans la zone de captage d’eau potable de la métropole d’Orléans, nous n’avons pas obtenu l’autorisation pour les travaux », déplore-t-elle.

« En fin de saison d'arrosage, en réutilisant toujours la même eau, cette dernière se charge en calcaire et peut boucher les sprinklers, précise Marie-Laure Javoy-Rauline. Tout le matériel est vérifié quotidiennement. L'hiver, tout le système est démonté et nettoyé. » (© F. Mélix)

70 % de l’eau réutilisée

Grâce à de nouveaux investissements en 2023 pour changer notamment la bâche des bassins, la pompe et les drains (200 000 € financés à 65 % par l’agence de l’eau Loire-Bretagne), 70 % des eaux sont désormais réutilisées en moyenne (contre 30 % auparavant).

« Mes parents, qui ont créé l’entreprise en 1984, ont toujours eu un esprit de frugalité : toujours faire avec le moins possible », explique Marie-Laure Javoy-Rauline. « Par ailleurs, la société a dû développer son activité et la pérenniser en s’adaptant au périmètre de la zone de captage d’eau potable dans lequel elle se trouve. Toute la pépinière a donc été pensée afin de réduire ses usages de l’eau et optimiser l’arrosage. Pour preuve, sur le site, tout est rectangulaire et beaucoup de plantes sont installées dans un petit espace. Nos 500 variétés ont des besoins en eau différents, les plantes sont donc positionnées en fonction de leurs exigences hydriques. »

Les arrosages ont lieu principalement en fin de journée ou la nuit, de 18 à 22 heures par exemple, puis le matin à partir de 5 h 30-6 heures, sauf pour les jeunes plantes, très consommatrices. Des tensiomètres, qui mesurent la capacité de la plante à capter l’eau de la réserve utile du sol, sont positionnés au centre d’une zone dont les besoins en eau des végétaux sont équivalents pour déclencher l’arrosage automatique.

« Il faut également, sans la stresser, contraindre un petit peu la plante de manière à favoriser les racines, rappelle-t-elle. C’est la base de notre métier. »

Toitures et surfaces bâchées sont connectées à un réseau de récupération gravitaire. (© F. Mélix)

Sécuriser l’approvisionnement

Avant ce dispositif de récupération, la pépinière consommait 90 000 m³ d’eau par an. Depuis 2003, le volume s’est restreint à 25 000 m³/an. « Le système mis en place n’est pas forcément reproductible, prévient Marie-Laure Javoy-Rauline. Cela dé­pend de plusieurs facteurs, comme la production et les capacités de chaque entreprise. »

Par ailleurs, la pépiniériste insiste sur le fait que l’investissement dans ces outils « n’est pas rentable ». « C’est le fruit d’une conviction profonde de notre père, qui a pris le risque financier pour ses enfants il y a vingt ans, appuie la cogérante. Mais en cas d’arrêté sécheresse décidé par le préfet, l’entreprise passe au travers des restrictions d’usage car on réutilise l’eau en circuit fermé. En absence d’eau, la pépinière ferme. Nous avions besoin de sécuriser notre approvisionnement. »

> A découvrir aussi dans ce dossier...

"Gestion de l’eau : un cycle vertueux"

- "Recycler pour sécuriser l'approvisionnement en eau", l'exemple chez le pépiniériste Javoy Plantes (Dossier dans Lien horticole n° 1150 de novembre 2025), et une charte d'engagement de Valhor ;

- "Irriguer avec des eaux traitées" (à Orléans), avec des avantages et obligations des labellisations, et "Maîtriser les excès en ville grâce à la végétalisation", dont à Coupvray (les deux articles dans le Dossier dans Lien horticole n° 1150 de novembre 2025).

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Recycler pour sécuriser l’approvisionnement en eau

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